Ligeard a-t-elle escroqué la Calédonie ?

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cynthia ligeard

L’affaire est explosive, des milliards sont en jeu et des têtes vont tomber. La province Sud va revenir sur la décision actée par l’exécutif Ligeard concernant le dossier « Prony-Pernod » et rendre publics les accords secrets passés avec Vale. Certains vont devoir rendre des comptes : explications.

A l’époque, la décision avait surpris et inquiété le monde politique : une délibération, prise quelques jours avant les élections, autorisait la multinationale Vale à exploiter les deux plus importantes réserves de nickel du Grand Sud. Certains évoquaient déjà « un pillage de nos ressources minières » mais malgré les critiques, Cynthia Ligeard s’était battue bec et ongles pour faire aboutir ce dossier. Ses opposants, au premier rang desquels Calédonie ensemble, avait promis en cas de victoire de revenir sur cette décision. Or, selon des sources bien informées, une enquête administrative diligentée par le nouvel exécutif aurait débusqué de graves malversations dans l’élaboration des accords mais aussi une « tromperie » vis-à-vis des élus afin d’obtenir leur suffrage.

Un « deal » à 23 milliards

A l’aune des informations à notre connaissance, les élus auraient été trompés lors du vote car des clauses secrètes dont ils ignoraient tout étaient inscrites dans un Memorendum Of Understanding confidentiel élaboré entre l’institution et la multinationale. En clair, les élus se sont exprimés sans connaître les conséquences de leur vote.

Dans ce texte – jusque là inconnu mais que la Province Sud pourrait rendre public – l’industriel s’engageait en fait à combler l’énorme dette de 7 milliards de la SPMSC et à éponger ses créances colossales évaluées à plus de 16 milliards. Cette société qui porte les parts de la collectivité dans le capital de Vale est en effet en situation de quasi dépôt de bilan. Par cette manipulation comptable, Cynthia Ligeard aurait permis à bon compte à cette société d’accaparer un bien public destiné aux générations futures. Les clauses secrètes stipulaient également que l’industriel ne serait pas soumis à une future redevance d’extraction…

Des négociations occultes

Pourquoi l’ex-présidente de la province Sud a-t-elle bataillé pour faire passer cet accord ? A l’heure d’aujourd’hui les raisons sont diverses et les hypothèses nombreuses. Toujours est-il qu’une clause du Memorendum Of Understanding indique très clairement que l’institution ne tirerait aucun bénéfice direct de l’exploitation des gisements et que le deal a été passé sans l’accord du Bureau de Recherches Géologiques et Minières (BRGM), l’organisme national référent du secteur.

De plus, le protocole « public » aurait été réalisé par les mêmes personnes ayant auparavant élaboré les clauses « confidentielles » acté dans le Memorendum Of Understanding. Parmi ces personnes se trouve semble-t-il Alban Tremblier l’ex-conseiller mines de Cynthia Ligeard. Ancien banquier d’affaire, il est aujourd’hui conseiller spécial rattaché à la présidence du gouvernement. Durant les tractations avec Vale l’homme aurait fait appel au même cabinet de conseil juridique international basé à Paris qui a été facturé plusieurs dizaines de millions de francs sans passer par une procédure d’appel d’offre.

Selon plusieurs analystes du milieu politique, cette affaire dont certaines ramifications restent encore à découvrir pourrait ni plus ni moins mettre un terme aux ambitions politiques de Cynthia Ligeard. D’autant plus que les critiques les plus virulentes émanent de son propre parti ; en effet, un proche de Pierre Frogier lui aurait d’ailleurs transmis une note relative à cette affaire indiquant toutes les irrégularités de ce sombre dossier.

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Officiant en free-lance pour plusieurs périodiques et médias calédoniens, cette pigiste professionnelle a rejoint l’équipe des contributeurs de Calédosphère depuis 2013 sous son nom de plume « Rita ». Spécialisée dans l’actualité quotidienne, elle se plait à y dénicher des sujets non-traités par les autres médias et à couvrir les évènements sensibles. Synthétique, réactive et parfois provocatrice elle essaie toujours d’écrire de manière claire, précise mais avant tout vivante. Son crédo : « Si ça pique, c’est un bon sujet »