En responsabilité au sein des institutions, les partis politiques Calédoniens énoncent leurs priorités, lancent les premières réformes et se montrent « au travail ». Mais en coulisse, les stratégies s’affirment et les leaders fourbissent déjà leurs armes. Revue de détail.
Comme le dit l’adage « Il faut s’attendre à tout en politique, où tout est permis, sauf de se laisser surprendre ». Dans le cénacle politique local, celles et ceux qui ont en charge l’avenir politique de leur formation savent que les prochains rendez-vous électoraux se préparent dès aujourd’hui et ne comptent pas se laisser surprendre. En ce début de mandature, le regard rivé sur une éventuelle élection législative anticipée, sur les présidentielles et les sénatoriales de 2017 ou – déjà – sur les provinciales de 2019, par leur comportement et leur positionnement, les leaders donnent les clefs pour savoir où ils veulent en venir.
Néaoutyine droit dans ses bottes
Chacun aura compris que depuis sa victoire aux provinciales, Paul Néaoutyine a repris en main l’ensemble des pouvoirs exercés par la collectivité du Nord. Avec un bureau exécutif exclusivement UNI (Union Nationale pour l’Indépendance) et la mise à l’écart de l’Union Calédonienne – y compris au sein des commissions – le leader du Palika a les coudées franches pour mettre en œuvre sa stratégie économique et faire passer son message politique auprès de l’Etat : l’accord de Nouméa, et rien que l’accord. Dans sa besace, ni solution consensuelle, ni référendum éclairé mais les consultations prévues par l’ADN stricto sensu. Le président de la Province Nord déclarant vouloir « convaincre » des électeurs non-indépendantistes lors des futurs référendums. Peut-être secrètement envisage-t-il, comme il la fait comprendre récemment dans les médias, qu’aux termes de l’accord la pleine souveraineté équivaudra à une quasi-indépendance… Quoi qu’il en soit, le temps semble être son meilleur allié.
Frogier attend Sarko
« C’est mon phare ». C’est ainsi que Pierre Frogier définissait l’année dernière Nicolas Sarkozy. En froid avec les instances de l’UMP nationale depuis l’élection de Jean-François Copé, le RUMP a eu tôt fait de rappeler que depuis sa déchéance, l’ex-RPR était redevenu fréquentable. Dans cette partie de poker, Pierre Frogier mise donc tout son tapis sur le retour au pouvoir de l’ex-président de la République et ne pense qu’à 2017, année où il pourrait, selon un proche « reprendre les manettes, et pourquoi pas dans le gouvernement Sarkozy ». Chi va piano va sano, en retrait depuis les élections qui l’ont encore fragilisé, le sénateur devrait donc par petites touches expliquer à ses troupes qu’au-delà de Sarkozy il n’y aura nul espoir de succès.
S’il compte en cela être aidé par l’impopularité croissante du gouvernement Hollande et par son absence d’initiative sur le dossier calédonien, il devra pour autant contrecarrer les voix qui, au sein du RUMP, réclament de plus en plus ouvertement son départ. Et s’il peut pour l’heure compter sur le soutien de Grégoire Bernut, le microcosme bruisse de rumeurs quant aux critiques internes dont il serait la cible de la part des « quadras », avec parmi eux Thierry Santa, Virginie Ruffenach ou encore Cynthia Ligeard aux premiers rangs.
Wamytan et Tyuienon se radicalisent
L’un a perdu la présidence du congrès, l’autre la vice-présidence du gouvernement. Conséquence de la défaite de l’UC aux élections dans le Nord et du mauvais score de la liste indépendantiste dans le Sud, l’Union Calédonienne est dans cette dernière mandature en perte de vitesse. Ni majorité au congrès, ni assemblée référendaire, ni alliance possible avec un Parti Travailliste grand perdant des élections.
Un choc ressenti jusqu’à la base militante a qui les responsables du mouvement avaient promis des lendemains qui chantent aux couleurs de l’indépendance « dès 2018 ». Bien conscients du relatif isolement de leur parti dans le jeu politique, les deux leaders semblent tenter de jouer leur va-tout sur la radicalisation. Menace de boycott du comité des signataires, politique de la chaise vide lors de la CESF, baroud d’honneur sur les radiations des listes électorales, discours victimaire devant l’ONU,… un comportement qui pour certains indépendantistes témoigne d’une perte de contrôle et surtout d’un retour à un positionnement défensif non-respectueux de l’accord de Nouméa.
Cependant, s’agissant de radicalisation, les derniers évènements de St-Louis ont démontré qu’ils n’avaient plus le contrôle d’une partie de leur jeunesse dont les préoccupations leur échappent. Oseront-ils pour autant franchir le Rubicon afin de se replacer en position de force ? Rien n’est moins sûr.
Gomes focalise sur l’avenir
Le leader de Calédonie ensemble l’avait annoncé : il n’entendait pas exercer de responsabilité à la tête des institutions en cas de victoire. Le député de la seconde circonscription a donc laissé la main en s’assurant auparavant qu’elle soit bien reprise par des hommes de confiance. Philippe Michel, le premier d’entre eux, à la tête de la province Sud, Philippe Dunoyer à la présidence de la commission permanente du congrès et des « hommes-à-lui » au sein de chaque institution. Le voici libre de se consacrer à l’avenir institutionnel en le préparant avec l’Etat et les indépendantistes. Pour autant, Mis en orbite depuis les provinciales, le chef de Calédonie ensemble ne pourra faire progresser son idée de « référendum éclairé » que si le fragile équilibre institutionnel est maintenu, notamment dans le camp loyaliste. Si celui-ci, sous le coup d’un dossier mal négociée ou d’un bon mot trop vite énoncé, venait à se fissurer, Philippe Gomès serait immanquablement ré-entrainé dans la bourrasque de la politicaillerie et ses espoirs avec. Fort, mais sans majorité et connu pour être peu conciliant, il doit veiller à conserver ce qu’il estime être une prévalence politique justifiée par les urnes tout en veillant à ne pas laisser ses adversaires prendre la main ostensiblement. Vaste programme.
Yanno est dans les cieux
Je crois qu’il faut qu’on soit conscient que le Congrès de la Nouvelle-Calédonie est la troisième assemblée législative de France, après l’Assemblée nationale et après le Sénat. Gaël YANNO
Par cette déclaration, Gaël Yanno disait récemment tout le bien et toute l’importance qu’il octroie à sa nouvelle fonction. Pour les observateurs attentifs de la vie politique calédonienne, celui qu’on surnomme le « miraculé » profite pleinement de sa charge et n’hésite pas à le faire savoir, tant et si bien qu’une éventuelle législative anticipée ne le passionnerait guère. Surtout après deux défaites consécutives en l’espace de deux ans. Malgré le processus d’élection du président du congrès – d’un mandat d’un an – l’ex-député répète à qui veut l’entendre « qu’il est là pour cinq ans ». Preuve s’il en est d’une certaine méconnaissance de l’histoire politique récente du pays.
Aucun président du congrès n’ayant exercé une mandature entière depuis Simon Loueckhote, élu en 1998. Cependant, Gaël Yanno y tient et pour cela il n’hésiterait pas à s’assurer les bonnes grâces de ses alliés politiques, au premier rang desquels le RUMP et surtout Philippe Gomès qu’il compte bien « coller à la roue dans les prochains mois », comme l’assure un proche du député.
Une logique qui ne serait pas du goût d’Isabelle Lafleur, de Sonia Backes et de Philippe Blaise qui continuent à entretenir une méfiance tenace vis-à-vis du leader de CE. Toujours est-il que, pour le moment, Gaël Yanno apparait comme étant en lévitation. Pour combien de temps ?
Ils cherchent à exister
Quant aux autres responsables politiques, mis de côté depuis les élections, la plupart d’entre eux attendent un changement politique ou de futures élections pour revenir sur le devant de la scène. Ainsi Pascal Vittori se concentre sur l’élection de Boulouparis qui l’opposera une fois encore à Alain Lazare. L’ancien élu Didier Leroux attendrait impatiemment une élection législative dans la 1ère circonscription pour porter l’étendard du RUMP-FPU et exigerait une place à la table des discussions sur l’avenir. En ce qui concerne Harold Martin, le maire de Paita affiche sereinement la couleur : il ne voudrait plus entendre parler d’accord entre les partis loyalistes et compterait bien « faire péter le système » par tous les moyens à sa disposition.
La perte de la présidence de l’OPT, le recours juridique à Paita effectué par Frédéric De Greslan et son isolement au sein du RUMP l’ont, en effet, encouragé à partir en guerre contre Calédonie ensemble…
Une fois encore, il est possible que la politique nationale en vienne à bouleverser les projets calédoniens des uns et des autres. Confrontée à des difficultés croissantes, à une économie en berne et à une contestation sociale qui va en s’aggravant, une partie de la classe politique française commence sérieusement à envisager une dissolution de l’Assemblée nationale, François Bayrou et plusieurs ténors de l’UMP s’étant ralliés à cette idée très récemment. Dans cette hypothèse – hautement probable – des élections législatives locales redistribueraient les cartes de celles et ceux qui ont appris qu’en politique « il faut s’attendre à tout ».
Question (sans doute naïve): pourquoi I. LAFLEUR et P. BLAISE n’ont-ils pas participé au congrès du parti ” de M. YANNO” ? Un (ou plusieurs) éclairage(s) serai(en)t bienvenu(s). Merci.
Tout cela, ce n’est que du bla bla. Dans les faits, on verra bien qui respectera sa parole et qui défendra réellement la position d’une Nouvelle Calédonie française face aux tentation d’un pseudo Etat composé d’autocrates en puissance.
Il est intéressant de constater qu’à l’UC, comme au RUMP (Ex- RPCR), il existe toujours un courant qui a beaucoup de mal à accepter le résultat des urnes. Après tout que les conservatismes se comprennent et se reconnaissent n’est pas en soi étonnant.
Depuis 50 ans, ça n’est que pour – ou contre – une Indépendance obsolète !
On ne vote que pour ce mirage du XXe S – devenu une illusion au XXIe,
mais qui reste un fond de commerce juteux pour une génération vieillissante…
Quelle stratégie politique hormis la rente électorale de quelques uns ?
Quelle autre vision d’avenir pour les gosses qui se tirent quand ils peuvent ?
Quelle perspective enthousiasmante alors que la maison brûle ?
[Et pendant ce temps-là, on refait ici tout ce qu’on ne veut plus ailleurs… Bof !]
Et rien sur la stratégie de SB et de SL ? Faut croire qu’elles n’ont pas de stratégie.
Frogier ministre de Sarkozy en 2017 ? alors là c’est le dernier film de sciences-fiction! Mais avec les rumpc, le pire n’est jamais certain. Mais à quel ministère ? Celui du travail ? mwaaaarrrrrffff! Et Simplet ?
Simplet à la culture me semble une évidence …
Personnellement, vu son activité professionnelle ces derniers mois et ses compétences je le verrais bien “Ministre du temps qui passe ….”
Entre un Hollande “Mr Bean” et un Sarko “has been”, c’est vrai que la France se dirige vers un grand changement. Mais quoi?
Et bien… “wait and see”…
C’est plutôt ” wait and bleed “
Que Frogier se rassure, Sarko sera de retour dans une quinzaine de jours max. et çà, je peux vous assurer que ca va pas faire rire les dissidents du RUMP 🙂
Exact Franck, Sarko a toutes les chances de reprendre les rennes de l’UMP.Premier tour le 29 novembre, deuxième (Si nécessaire) le 6 décembre.
Non, Sarko est foutu avec cette nouvelle affaire qui vient d’éclater.
Juppé sera le nouveau Boss de l’UMP.
Juppé a annoncé sa candidature à la primaire UMP pour 2017. Il a aussi dit que le Président de l’UMP ne devait pas être candidat à la primaire. Alors, il ne sera pas le boss de l’UMP…
Chiche !!!
“Sarko a toutes les chances de reprendre les rennes de l’UMP”
Les renNes de l’UMP … Rigoberto qui traite l’UMP de bétail ! Virage à 180°, Rigoberto ?
Le problème Franck c’est que l’ancien Président de la République (NDLR Nicolas Sarkozy) est trop clivant que cela soit dans son camps et/ou au sein de l’opinion publique Française…
Faut pas rever, Franck.