Dans un dossier publié dans son édition du jour, le quotidien calédonien affirme que les mauvaises ventes de la littérature locale (sic) sont dues à l’internet et à l’autoédition des ouvrages. Les Nouvelles oublient juste la nullité des « auteurs »… Pamphlet.
Naïveté et arrogance font souvent mauvais ménage et, encore une fois, les Nouvelles Calédoniennes ne comprennent pas le sujet qu’elles décident de traiter. Dans un article intitulé « Trop de livres tue le livres », le quotidien explique que le marché local « est inondé d’une production parfois médiocre » qui est la « conséquence de l’autoédition » (c’est-à-dire la capacité pour un auteur de prendre lui-même en charge l’édition de ses ouvrages sans passer par une maison d’édition). A l’appui de sa démonstration, les Nouvelles listent les preuves : « Une coquille sur la quatrième de couverture. Un texte bourré de fautes dès les premières lignes. Une syntaxe douteuse, rendant l’histoire difficilement compréhensible. Des marges trop grandes. Pas de titre sur la tranche… » Raisons pour lesquelles les livres « calédoniens » ne trouveraient pas leur public. Une centaine d’ouvrages sont en effet publiés chaque année sur le caillou quand seulement une demi-douzaine réussissent à se vendre. Comme solution, le quotidien met en avant la création « d’un éditeur local d’ampleur » qui pourrait organiser un calendrier littéraire et ainsi « créer le désir » chez les lecteurs. Mais quel désir ? Puisqu’à la vérité, le problème de la littérature calédonienne c’est qu’elle est simplement dépourvue d’auteurs dignes de ce nom ou capables d’inventer des histoires dignes d’intérêt.
Le problème, ce n’est pas la forme, c’est le fond
Ainsi, les Nouvelles Calédoniennes – qui n’ont plus eu de véritable « plume » en leur sein depuis Bernard Sylvano(1) – se trompent lorsqu’elles estiment que l’écriture demande seulement « du temps et de l’investissement ». Ce que la littérature exige en revanche c’est du talent et force est de constater que la Nouvelle-Calédonie en est aujourd’hui pratiquement dépourvue. Alors, bien sûr, il y a des exceptions, mais rarissimes ! François Garde(2) dont le succès de Ce qu’il advint du sauvage blanc lui a valu le prix Goncourt du 1er roman en est une, mais les « écrivains » locaux auront tôt fait de lui reprocher de n’être pas assez Calédonien à leur yeux. Il y a certes Vincent Vuibert(3), sorte de Salinger local dont le premier ouvrage a représenté la bouffée d’air littéraire de ces dernières années, mais au-delà ? Et qu’on ne taxe pas cette réflexion d’obtuse : que celui qui a déjà réussi à finir en entier (sans y être obligé) un livre de Gorodey ou de Kurtovitch, nous jette la première pierre…
Et puisque le quotidien local propose une solution pour redorer le blason de la littérature calédonienne, Calédosphère en présente une autre. Celle-ci a déjà été émise lors de la dernière rentrée littéraire par Charles Consigny dans un édito du Point : elle consiste à promulguer une loi interdisant aux auteurs qui n’en sont pas de publier des ouvrages, par respect pour leurs pairs, pour les lecteurs et pour l’image qu’ils renvoient malgré eux de leur époque ou de leur pays :
« Le législateur devrait créer une loi subordonnant la publication de tout livre à une condition de nécessité impérieuse. La jurisprudence viendrait préciser que cette nécessité pourrait être de deux natures alternatives : il pourrait s’agir soit d’une nécessité pour l’auteur lui-même, qui ne pourrait faire autrement que d’écrire et publier son texte, répondant ainsi à un impératif plus grand que lui (une commande de son âme, de Dieu, de ses souvenirs, des morts) ; soit une nécessité pour la population, pour le public, qui, si l’œuvre devait ne pas paraître, y perdrait un apport substantiel à son élévation culturelle, morale, artistique ou spirituelle. Les ouvrages ne répondant manifestement pas à une nécessité impérieuse pourraient se voir attaquer devant les tribunaux, et leurs auteurs condamnés à verser des dommages-intérêts aux lecteurs et à l’État pour le préjudice subi par la collectivité. (Charles Consigny, les auteurs contre les écrivains) »
Se trouver dans un trou, au fond d’un trou, dans une solitude quasi totale et découvrir que seule l’écriture vous sauvera
Ainsi parle Marguerite Duras dans Écrire. À tous ceux qui ne connaissent pas cette solitude, par pitié, abstenez-vous !
(1) Intimes convictions : les grandes affaires criminelles de Nouvelle-Calédonie : Volume I : 1993-1995
Sylvano Bernard
Éditeur : Barney, 1996
(2) Ce qu’il advint du sauvage blanc
François Garde
Éditeur : Gallimard, 2012
(3) Chroniques de la mauvaise herbe
Vincent Vuibert
Éditeur : Madrépores, 2013
Le premier disque d’Elvis était en auto-édition. C’était pour l’annif de sa mère.
C’est vrai qu’Elvis n’avait besoin de personne pour faire du bruit :
http://www.lepoint.fr/people/quand-elvis-presley-explosait-ses-toilettes-a-la-mitraillette-12-10-2014-1871668_2116.php
Bien FLOYD !
Je sais.
Que mon propos soit bien compris….je ne suis pas contre qu’un musicien sorte un CD, qu’un écrivain publie un livre, qu’un peintre, qu’un sculpteur présente une oeuvre………non ce que je reproche, c’est la facilité, la rapidité à laquelle on met ces artistes trop vite sur un pied d’estale en Nlle Calédonie…….ça monte vite au cerveau ces conneries….dure dure sera la chute !!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!
“on met ces artistes trop vite sur un pied d’estale en Nlle Calédonie…”
Ben voilà la solution, suffirait de les mettre sur un piédestal comme ailleurs dans le monde : pourquoi, ici, cette idée saugrenue d’utiliser un pied d’estale ?
Ce qui est valable pour les soit disant écrivains locaux est à mon avis, aussi valable pour les auteurs-compositeurs qui sont édités, ou s’éditent par eux-même en Nlle Calédonie….Certains n’ont fait qu’une chanson, voir deux qui tiennent à peu près la route et on les envoie en Australie, NZ, France pour des tournées, comme s’ils étaient des stars….comment voulez vous qu’ils se remettent en question et cherchent à évoluer………….
Ils évoluent, j’en suis certaine, la pression médiatique fait évoluer. Ce sont bien des stars, les stars d’un petit pays de 250 000 habitants. Nous les connaissons et les reconnaissons dans la rue, ils ont leurs fans. Combien de stars chinoises connaissez-vous? Pourtant, elles doivent avoir des millions de fans! Nous vivons ici, par choix et librement, ne l’oubliez pas Monsieur.
C’est facile de traiter de bouse quelque chose qu on n’est pas capable de faire soi même 🙂 si les auteurs ont plaisir à ecrire, pourquoi leur retirer le plaisir d’éditer et de se faire juger par la critique? En dernier ressort, c’est le lecteur et le bouche a oreilles qui décide de la vente
Nicolas Kurtovitch, le “wannabe” écrivain et grand pote d’Eric Gay va certainement apprécier.
Lol, ce que vous decrivez, existe dans tous les pays du monde et depuis des siècles. Souvenons nous de la première scene de cyrano de Bergerac 🙂
Ben ça ! Au même titre qu’on n’est pas forcement journaliste si l’on écrit dans un journal on n’est pas non plus écrivain si l’on a publié un livre ou chanteur parce qu’on a sorti un disque. On peut remonter aux calendes grecques et trouver des millions d’artistes, écrivains (qui avaient peut-être du talent ?) et n’ont jamais connu la célébrité, ce n’est en tout cas pas une raison pour tolérer que n’importe quelle soupe littéraire ou artistique nous soit servie !
Oui, d’accord avec toi. Chez tous les artistes la loi de la sélection naturelle est de mise. Mais au moins chacun a sa chance. On apprend par ses erreurs et si on n’a même plus le droit de faire des erreurs on n’apprend RIEN.
“Les « auteurs » locaux sont des snobinards”. T’as raison et pour la plupart c’est vrai. Certains se disent même être des “intellectuels”…….., n’ont pas peur la bande. Se qualifier d’intellectuel en Calédonie c’est comme se dire être chanteur d’opéra lyric dans un groupe de Kaneka.
Cela me donnes envie de visiter le SILO , histoire de rire . Merci de ton avis , un plaisir de te lire. ” Le mauvais goût du temps de RONSARD, c’était MAROT, …..du temps de VOLTAIRE c’était CORNEILLE…. Du temps de CHATEAUBRIAND c’était VOLTAIRE …..” citation de G. FLAUBERT. RITA devrait découvrir les classiques . Tiens c’est un français qui a obtenu le prix NOBEL de littérature ce jour !
« Trop de livres tue le livres »Et trop de CD de musique lokale tue les CD en Calédonie?NON , alors il faut arrêter ce faux débat. Certains veulent le monopole de l’édition, c’est tout.