François Hollande l’équilibriste

Pour sa première visite sur le territoire, déjà jugée sans fausse note, François Hollande a réaffirmé la neutralité de l’État dans le processus crucial qui se joue en Nouvelle-Calédonie. Synthèse.

C’est dans la moiteur d’un lundi sous les tropiques que François Hollande a parcouru en quelques heures et au pas de charge la Grande Terre, au grand dam du pool des journalistes qui étaient un peu frustrés par ce déplacement-éclair. Tout au long de la journée le président de la République a joué le rôle de l’équilibriste. Sur le fil, sans heurté qui que ce soit, il a honoré son programme en lançant quelques pistes sur les préférences de l’Etat concernant des dossiers chauds calédoniens.

Hommages

Après un passage place Bir Hakeim, François Hollande s’est dirigé dans la nécropole du 4ème KM pour se recueillir sur la tombe de l’ex-leader de la famille loyaliste, Jacques Lafleur. Une première pour cet homme qui fut parfois controversé dans son propre camp. Un recueillement en présence de la famille Lafleur mais aussi avec Marie-Claude Tjibaou, qui tout au long de la journée est restée au bras d’Isabelle Lafleur. Après cet instant nostalgie, la délégation présidentielle s’est rendue dans le grand Nord à Tiendanite à Hienghène, qui est devenu le passage obligé des politiques lors de leur passage sur le caillou, sorte de nécropole de Saint-Denis à la sauce calédonienne. Devant la famille Tjibaou et devant le président de l’Union calédonienne, Daniel Goa, le chef de l’Etat a évoqué « la mémoire d’homme disparus, d’homme de cœur, d’homme de bien, d’homme de raison ».

L’État ira jusqu’au bout pour que les engagements pris soient tenus et pour que les Calédoniens aient le dernier mot pour déterminer leur destin

Les Calédoniens, maitres de leur destin

« Ce sont les Calédoniens qui auront le dernier mot » voilà les propres termes du premier personnage de l’État. Un message qui a été martelé tout au long de son séjour et qui a été réaffirmé hier soir devant les corps constitués néo-calédoniens au centre culturel Tjibaou. Si certains ont en tête les difficultés budgétaires de l’État, le président de la République en tant que garant des institutions et de l’intégrité du territoire français a balayé d’un revers de la main tout largage financier de la part du pouvoir central.
Au cours de son allocution devant les élus réunis au grand complet, avec aux premiers desquels les parlementaires à l’exception du député européen, François Hollande a lancé un appel en direction des Calédoniens : « Ayez confiance en vous, bâtissez la société de demain ». La manifestation lancée par Harold Martin sous le slogan « restons français » qui a réuni des milliers de Calédoniens à Nouméa n’aura pas spécialement modifié le cours de cette visite, d’autant plus que si le 14 juillet était bien en avance dans les rues du centre-ville, la délégation présidentielle et les journalistes des médias nationaux qui l’accompagnaient étaient à ce moment-là à 300 km au Nord du territoire.

L’inauguration de l’usine de la discorde

Le 6 mars 2006 François Baroin posait la première pierre de l’usine du Nord et en ce 17 novembre 2014 François Hollande parachève l’histoire de cette entité industrielle qui fut pendant des années pour toute une partie de la classe politique locale une simple chimère. Pour cette inauguration symbolique, le chef de l’État a souhaité faire passer un message plus politique : le rééquilibrage économique de l’archipel. Le président a ainsi rappelé que ce projet a été l’un des plus importants en France depuis des années, avec un équipement pharaonique qui pèse près de 7 milliards de dollars qui représentent aujourd’hui « un symbole fort du rééquilibrage ». L’usine du Nord emploie beaucoup de jeunes, qui sont pour le locataire de l’Élysée « un accomplissement politique ». Un accomplissement qui s’est concrétisé au cours de ce déplacement par une visite du fringant projet de Gouaro Deva, où le chef de l’Etat a rencontré des jeunes représentatifs de la jeunesse calédonienne. Une visite qui s’est faite sous un ciel bleu, dans cette chaleur de la côte ouest, frappée par la sècheresse. Certains auront noté que la « scoumoune » d’un François Hollande qui attirerait la pluie comme un aimant n’aura pas eu de prise sur le territoire calédonien.

François Hollande, le monsieur climat

Cette tournée dans le Pacifique sud aura permis au chef de l’Etat d’endosser le costume de monsieur climat, tels en chantre de la lutte contre le réchauffement climatique, le président de la République a été à la rencontre des représentants de ces micro-états d’Océanie qui sont en première ligne face à aux perturbations climatiques. Après les tables rondes du G20, le président de la République s’est donc mué en sherpa du climat face aux représentants de la Communauté du Pacifique Sud. Laurent Fabius secondé par Nicolas Hulot a été à l’écoute presque au chevet des pays de la zone. François Hollande durant son discours devant l’assemblée de la CPS a rappelé la nécessité de financer le fameux fond vert et rappelé par la même occasion que la France versera à ce fonds un milliard d’euros. Mais le chef de l’État n’a pas profité longtemps de ce bel horizon et de l’eau limpide du Pacifique avant de retourner à la dure réalité parisienne. Face à ses alliés écologistes qui lui remettront sur le tapis son peu d’allant quant à la fiscalité verte et aux coupes budgétaires dans le secteur de l’écologie.

François Hollande aura finalement été durant son séjour en terre calédonienne davantage le premier secrétaire du parti socialiste qui se délecte dans la synthèse plutôt qu’un président de la République, hautain mais charismatique.