PIERRE FROGIER, LA SAGESSE D’UN PAPE ?

La récente décision papale offre un parallèle saisissant à notre vie politique.

Alors que l’article des Nouvelles Calédoniennes du 12 février sur le travail du gouvernement alimente les discussions, un constat doit survoler la polémique. C’est le paysage politique dans son ensemble qui est coupable de l’immobilisme actuel, et le gouvernement n’est qu’un rouage d’un mécanisme institutionnel que trop de manipulations ont totalement grippé.

Dès lors, que nous reste-t-il ? Nous disputer 1000 fois sur le fait que les membres Calédonie Ensemble du gouvernement ne travaillent pas, que les élus indépendantistes n’en font pas plus alors qu’ils sont censés travailler ? Que les membres du Rassemblement et de l’Avenir Ensemble alignent ce qu’ils peuvent mais sans pouvoir à eux seuls porter toute l’action d’un gouvernement supposé collégial ?

Tout le monde sait bien que seule la fumée blanche d’élections bien tranchées amènera le chemin de croix des calédoniens à sa dernière station, mais qui se sent capable de patienter encore 17 longs mois dans les conditions actuelles ? Pas moi en tous cas, et certainement pas à la veille d’une année 2014 si symbolique. Bon sang même Jésus n’a pas attendu aussi longtemps avant de ressuciter !

Mais peut-être y a-t-il une autre solution : un miracle.

Pierre Frogier, que l’on pouvait encore qualifier de personnage majeur de la politique calédonienne avant la croisade des deux drapeaux, s’est depuis aliéné une majorité de calédoniens. Ses anciens disciples ont souffert de l’absence totale de concertation sur une décision de cette ampleur et surtout d’avoir dû la défendre par loyauté dans l’espoir qu’elle avait été suffisamment bien négociée à l’avance. Même les indépendantistes peuvent lui reprocher de n’avoir pas suffisamment préparé le projet en interne, et lui imputer le retour de bâton issu de son propre camp. Le mal est si fort que même des membres du Rassemblement, qui reconnaissaient son autorité par le passé, mènent une action de fond qui pourrait conduire son parti à un schisme.

De son côté, le pape a décidé en son âme et conscience de cesser ses fonctions le 28 février prochain. Les premières réactions à cette annonce sans précédent faisaient état de la fragilité de sa santé, à mettre en regard de l’intensité de sa fonction. Mais dans un second temps, les observateurs ont plutôt mis en avant une grande fatigue morale. Celle-ci serait causée par la prise de conscience que le monde a évolué beaucoup plus vite que l’Eglise et que l’y reconnecter exigeait sans doute un état d’esprit ou une vigueur qu’il n’a pas, tout Pape qu’il est. Son geste est d’autant plus remarquable qu’il n’est pas le premier Pape à avoir une santé délicate, et qu’il est connu pour être extrêmement dogmatique. Donc pas vraiment le genre à souhaiter voir la religion passer du stade de la musique liturgique à celui de la techno ou du hip-hop. Pourtant il s’en va, pour le bien d’un intérêt supérieur : celui de l’Eglise, qu’il est censé servir.

Pierre Frogier avait commencé à emprunter ce chemin lorsqu’il s’était déclaré fatigué, et qu’il disait vouloir introniser de plus jeunes politiques que lui. Avant de changer d’avis, il était en passe de réussir ce que Jacques Lafleur avait raté et avait même trouvé une justification à sa retraite au Sénat en expliquant que c’était la première chambre consultée à l’occasion de changements de statut des collectivités territoriales.

Son départ au couvent serait pourtant une excellente chose. En modifiant l’équilibre global de l’échiquier politique, il pourrait donner jour à de nouvelles alliances, beaucoup moins contre nature. La machine se remettrait alors en marche et préparerait la voie à un plus vraisemblable front loyaliste en 2014, front que tant de calédoniens appellent de leurs prières. D’autant que dans ces conditions chacun pourrait continuer à vivre sa petite vie de pêché de son côté dans le parti de son choix.

Monsieur Frogier, démissionnez de la présidence de votre parti. Les temps ont changé. La politique, l’économie, la population, plus rien ne fonctionne comme avant. Tout cela est certes devenu un beau bordel mais il semble qu’il y-ait des gens qui s’y retrouvent assez bien. Oh ils n’ont pas de mérite, ils ont été élevés dedans.

P.S. Prenez Cynthia Ligeard avec vous en sortant. Elle ne connaît que le Notre Père et ça devient fatigant.