J’ai lu Néaoutyine

J’ai laissé à d’autres le soin de commenter la publication par le président du RUMP de son « opusculet » (ce qui me fait dire que la pensée politique de Pierre Frogier s’exprime avec moins de mots qu’un Oui-Oui d’Enid Blyton), et les démêlés judiciaires du président du gouvernement, qui collectionne les mises en examen comme d’autres les coléoptères.

Moi, j’ai lu Néaoutyine.

C’est d’ailleurs étrange comme après chacune de ses prises de positions, on semble « redécouvrir » le président de la province Nord. Au-delà du simple fait qu’il est l’immuable président de la province nord depuis 1999, l’homme est pourtant constant dans ses dires et ses écrits, ses convictions et ses pensées.

Néaoutyine est sans doute l’indépendantiste le plus raisonnable et le plus intransigeant, ce qui pour ce qui le concerne, n’est aucunement paradoxal. Il lui faut posséder en effet ces deux traits de caractère pour mener à terme la mission qu’il s’est fixé de rendre viable l’indépendance. Si Jean-Marie Tjibaou a dessiné les contours du grand rêve kanak d’indépendance, c’est bien Néaoutyine qui depuis 30 ans, œuvre à lui en conférer une réalité. C’est en cela qu’il tranche sur ces indépendantistes fluctuants comme des algues des hauts fonds sensibles aux marées et aux courants.

C’est aussi cette constance parfois butée qui séduit et fait du maire de Poindimié, selon un désormais célèbre sondage secret, la personnalité politique préférée des Calédoniens.

Nourri très tôt au lait du marxisme cru et au bon goût de révolution des peuples, Paul Néaoutyine n’a jamais rien renié de ses fondamentaux. C’est bien pour cela qu’il ne transigera jamais avec un Rump dont il ne cesse de dénoncer la porosité des frontières entre les pouvoirs politiques et économiques. Un Rump qu’il honni, présidé par un Frogier dont il n’a pas oublié l’opposition obtuse à l’usine du Nord durant quinze ans. Un Rump qu’il méprise tout comme ses succédanés que sont Leroux ou Yanno. Et c’est bien parce qu’il a trouvé porte close de ce côté-là du FLNKS, que le Rump s’est acoquiné depuis avec l’UC et le Parti Travailliste.

Dans l’interview qu’il a accordé aux Nouvelles, Néaoutyine ne tacle pas tout le monde comme l’a cru le journaliste, il exprime d’abord à la fois sa vérité et sa force. Pour autant, il est plus que jamais aujourd’hui l’incontournable homme du dialogue. Solide dans sa province et sa commune, adossé à un bilan de gestion des plus prestigieux, adoubé par les plus hautes autorités de l’État, Néaoutyine est celui sans lequel rien de ce qui concerne l’avenir ne pourra se faire. Qu’on se le dise ! Le Rump en veut sans doute d’ailleurs à Calédonie Ensemble de l’avoir très tôt compris, et dont le chef Gomès, organisait dès 2009 un débat politique et public avec le leader du Palika, auquel on se réfère encore et qui a fait date.

CATON