BOULARI CITY, LA CITÉ DES BOULES…

Pas vilain, vu de loin, l’ensemble urbain de Boulari, du centre-ville du Mont-Dore…

Mais au second coup d’œil, un peu plus attentif, les problèmes sautent aux yeux et Boulari City semble plutôt une cité qui donne un peu les boules comême : entassement des immeubles au ras d’un boulevard à la circulation intense, absence totale d’aire de jeux ou/et de parc gazonné ou/et de maison de jeunes, dégradation à vitesse grand V des installations, jeux de ballon dans les parkings aux risques et périls des automobiles garées là.

On a réinventé à la fois St Quentin, Montravel et La Courneuve… Alors que les parcs, terrains de foot et autre ruineux terrain de base-ball abondent partout ailleurs, la mairie, la SEM AGGLO, la SECAL … n’ont rien prévu en terme d’espaces de loisirs et de détente pour les jeunes de ce nouveau quartier très dense et plus peuplé à lui seul que toute la tribu de Saint-Louis dont le nouveau terrain de foot vient d’être livré… De gardiens, de concierges, de surveillance régulière de la police municipale, il ne semble pas être trop question non plus… Sinon on peut supposer que les portes des entrées avec codes n’auraient été carrément démontées et emportées, que les interrupteurs saccagés ne pendraient pas pathétiquement offrant leurs fils dénudés aux doigts des enfants. Non ?

Le site Internet de la SECAL nous raconte bien des salades, vertes of course, promettant aux résidents « les facilités de la vie moderne alliées à l’art de vivre à l’océanienne » (bonjour la « vie à l’océanienne » dans le bitume et le béton !…) et « un parc urbain paysager » (encore une Arlésienne à attendre sans doute aussi longtemps que le lycée « Amiante Land » de Saint-Michel, dans cette Ville du Mont-Dore qui « fait de la qualité environnementale sa priorité »… En attendant les enfants et les jeunes jouent et s’ébattent sur les trottoirs, dans les entrées et cages d’escaliers, dans les parkings, entre les bagnoles, sur la place du Monument aux Morts. Les tentatives d’incursion dans la Case des Communautés ont été découragées par des gardiens pitbull, ce machin de paille et de bois à 60 millions, bidon et tape à l’œil, étant apparemment mieux protégé que les logements et les lieux de vie réelle des gens. Le logement social géré de cette façon est une insulte aux populations.

témoignage :

Vendredi dernier, vers 17 heures, après avoir choisi un petit Chablis chez les très aimables gérants de la cave à vin de Boulari, je laissai ma voiture face à ce petit royaume de Bacchus, et déambulai vers la mer et le marché broussard mensuel où mon épouse choisissait déjà quelques gourmandises. Les cris de quelques bandes de surexcités hurleurs s’engouffrant dans les cages d’escaliers et les degrés à l’air libre des immeubles Makatéa ne m’émurent pas plus que cela.

Cependant, après quelques emplettes et aimables rencontres – c’était avant le passage du cracheur de feu, de vérole et de noms d’oiseau – nous eûmes le loisir d’observer de plus près les entrées de ces appartements qui de loin ma foi font encore bonne figure. Cet examen fut fort utile et permit de constater que de portes en PVC, il n’y en avait plus la moindre miette dans chacun des couloirs, charnières et montants arrachés, vantaux évaporés.

Pour ce qui est des boites à lettres, dont la peinture verte et neuve attestait une prime jeunesse de deux ou trois ans, des artistes les avaient customisées et avaient donné à chaque boite une personnalité propre, en les arrachant, en les tordant dans des formes diverses et variées, en ne laissant parfois qu’une charnière en place, conférant ainsi à la porte du ballant et un statut de mobile ou d’installation dynamique. L’intérêt pour les locataires de ces charmants lieux c’est qu’ils n’ont pas à se soucier d’emporter leur clé pour récupérer leur courrier. Entre les immeubles Makatea et Takaroa, il semble même exister une saine émulation et un distrayant concours de boites aux lettres pliées comme des origamis métalliques.

Les néons s’étaient absentés ou pendaient au bout de fils improbables, ou plutôt c’est une petite plaque de plastique blanc qui parfois révélait aux archéologue avertis la présence ancienne d’un éclairage. Les interrupteurs éclatés offraient leurs fils dénudés aux doigts des enfants pour des travaux pratiques de technologie ou pour des séances d’exploration sensorielle.

Divers déchets et déjections maculaient le sol. Les murs et le dessous de la naissance de l’escalier portaient les nombreuses trace rondes de suie noire de bougies, de briquets ou d’autres torches non identifiées, un peu comme à Lascaux ou Altamira. L’ensemble semblait vouloir s’organiser et prendre sens mais on n’observait cependant pas de mains négatives au pochoir, ces artistes du pariétal paraissant déjà connaître les dangers de la chaleur et du feu.

Durant ces découvertes enrichissantes et sidérantes, des hurlements et des beuglements résonnaient, jusque dans la rue, dans les étages et les paliers que d’ingénieux architectes et de généreux maîtres d’œuvre ont ouverts à tous les vents pour la plus grande tranquillité et le plus grand bien-être de tous les résidents, que l’absence de gardiens et de police installent et renforcent dans leur autonomie et leur responsabilité assumée, les aidant ainsi à lutter contre la peur irrationnelle et le sentiment infantile d’insécurité (je crois qu’il y a un copyright sur ce ©sentiment-d’insécurité, non ?).

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