Calédonie Ensemble : populisme de droite ou populisme de gauche ?

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populisme

Un leader éloquent, une stratégie de communication qui porte sur tous les sujets d’actualité et une combativité très remarquée contre le pouvoir en place, au point de s’en extraire en choisissant de ne pas occuper ses fonctions au gouvernement pour mieux l’attaquer. Une définition plutôt convaincante de ce que l’on imagine être le populisme.

Mais le populisme n’est pas un positionnement politique, c’est plutôt un style et une méthode qui capitalisent sur le ressenti du peuple pour générer un courant de société. L’exemple le plus caricatural en est probablement l’Argentine où tous les partis politiques, de l’extrême gauche à l’extrême droite, se réclament du « péronisme », qui en est le synonyme local.

Dire que Calédonie Ensemble est un parti populiste, ce n’est donc finalement qu’exprimer un ressenti sur ses méthodes de communication, ce n’est en aucun cas caractériser une vision politique. Et sur ce thème, l’analyse est moins évidente et requiert de s’intéresser de plus près à ses grandes prises de position.

Lors de l’élection présidentielle de mai 2012, le parti a officiellement renoncé à soutenir un candidat plutôt qu’un autre, en arguant que la diversité de sa base lui imposait de laisser chacun de ses sympathisants choisir en son âme et conscience entre François Hollande et Nicolas Sarkozy. Les mots de Philippe Gomès sur Océane le 28 février 2012 sont d’ailleurs très clairs : « C’est vrai qu’on a chez nous une grande part de gens qui votent Nicolas Sarkozy, mais on a aussi, chez nous, des centristes qui vont voter Bayrou, des Verts qui vont voter Joly, des socio-démocrates qui vont voter Hollande, des gens qui vont voter Marine Le Pen. » La subtilité du positionnement, qui prône le respect des choix politiques individuels, ne peut faire oublier que les deux présidentiables étaient clairement marqués. Le choix de François Hollande de taxer à 75% les hauts revenus était aussi fondamentalement à gauche que le « Ce sont les valeurs du travail, de l’effort et du mérite qui nous permettront d’être plus forts » de Nicolas Sarkozy était résolument à droite. Le parti lui-même savait donc déjà en 2012, et annonçait publiquement, qu’il comptait dans ses rangs suffisamment de sympathisants socialistes pour qu’il ne prenne pas le risque de les froisser.

En juillet 2012, la campagne de Calédonie Ensemble fut très ciblée. Elle se résume en 2 thèmes repris par une note manuscrite de Sonia Lagarde sur son affiche de campagne : « Plus de justice sociale et une solution institutionnelle résolument inscrite dans la France ». Il s’agit donc d’un retour de la France dans le discours de Calédonie Ensemble, qui deux mois plus tôt ne donnait aucune consigne de vote aux présidentielles. En fait un retour poussé par une alliance de ses adversaires électoraux avec les indépendantistes qui avait fait trembler la Calédonie. Dans ce contexte, le premier thème mis en avant, la justice sociale, clairement positionné à gauche, a été à la fois dilué par la question institutionnelle si présente durant la campagne, et habilement inséré dans la thématique de la vie chère pour, semble-t-il, « caresser l’aile gauche du parti sans en froisser l’aile droite ».

Lors de son congrès du 22 juin 2013, le parti a expressément renoncé à véhiculer un message politique précis sur le devenir institutionnel de la Nouvelle Calédonie. La communication a porté sur une nécessité d’éclairage des visions indépendantiste et non-indépendantiste, mais sans aucun commentaire sur l’une ou sur l’autre, donc sans éclairage aucun de la part du parti même qui le prônait. Il serait intéressant à cet égard de savoir si les militants présents ce jour-là ne s’attendaient pas justement, en venant à ce congrès, à recueillir l’arbitrage politique de leur parti sur ce sujet fondamental. Ce retour en arrière est surprenant après une campagne législative si résolument marquée par un positionnement loyaliste, et laisse à penser que des tensions internes n’ont pas permis de choisir un message plutôt qu’un autre.

Les grands textes portés par ses élus au congrès donnent un sentiment similaire de positionnement mitigé et de progression « à couvert ». En premier lieu, le texte sur la concurrence d’octobre 2013, s’il est d’inspiration initiale plutôt libérale, a été porté dans un positionnement très à gauche, basé sur le rejet des officines et des clientèles identifiées Rassemblement. Les efforts du parti pour élargir les minima sociaux en octobre 2012 relevaient par contre d’une thématique très fortement socialiste, au point que le parti n’a jamais identifié les moyens de financer ces lourdes dépenses, tout en critiquant cet état de fait comme s’il se dégageait de la responsabilité de le faire. Ce que les mauvais esprits reconnaîtront probablement comme une manœuvre très habituelle à gauche : « la gauche dépense, la droite paye ». Ces choix politiques ont eux aussi été portés sous couvert de la thématique de vie chère et dans les deux cas, votés avec les voix indépendantistes d’ailleurs.

Mais ce centrisme de circonstance, pour l’instant alimenté par le désastre des positionnements économiques et politiques du Rassemblement, l’ennemi de toujours, risque de se retourner contre sa propre base. Si son électorat se retrouve bien en effet sur le rejet du clientélisme et de l’affairisme mais pas sur un projet de société partagé, notamment en matière de politique économique, le risque est que les mesures portées par ses élus après les provinciales divisent à chaque fois le parti en deux. Un parti dont la base se fracture pendant que ses élus exercent leurs mandats risque de repartir dans une stratégie populiste, synonyme de recherche d’optimisation électorale et non de réformes de fond. Comment en effet faire vivre des ambitions de droite et de gauche dans l’exercice quotidien du pouvoir ? En baissant les impôts puis en les augmentant ? A ce stade, le plus tentant compte tenu de la composante indépendantiste du congrès, pourrait être d’aller chercher des majorités à gauche comme le parti le fait depuis maintenant trois ans, au grand dam de ses sympathisants de droite.

L’accord de Nouméa, seule feuille de route possible pour un parti qui a besoin de rassembler pour vivre mais qui ne peut afficher ses ambitions de gauche sans perdre son électorat traditionnel de droite, vit ses derniers instants. Et cette disparition programmée va avoir lieu au cours des 5 prochaines années dans un paysage de crise budgétaire qui commandera de prendre des positionnements forts pour niveler les déficits sans écraser l’économie et la population sous les impôts.

Espérons que les positionnements réels seront affichés suffisamment en amont des élections pour que la mariée Calédonie Ensemble n’avance pas vers l’autel de ses futurs mandats en tenant ses électeurs de la main gauche.

SylvainNC

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Néness

Ben oui, ça mange pas de pain de clamer: “A bas les riches”…Ça fait tellement plaisir au plus grand nombre! Mais en même temps, pas fâcher les “petits” patrons de la CGPME, dont est issue la tête de liste CE du Mont Dore, par exemple.
Une campagne électorale ça coûte cher, en plus..
Exercice d’équilibrisme délicat! Et casse-gueule, s’il en est.
Vaut mieux critiquer les autres partis que préciser le programme.
Ça, au moins, c’est sans risques. Et puis il y a toujours tellement de mécontents!

Eric

Que CE soit plus sociale que le RUMP c’est un fait, mais faut pas te gourer de sujet mec…
Quand à tes insinuations de soutien financier de la CGPME, c’est du haut niveau… !!!
Mais j’y pense ce n’est sans doute pas ce que tu voulais sous entendre…!!!

Calboche

CE est un parti de droite avec des idées de gauche voir du centre !

Omega

Vous avez vraiment la langue chargée de mauvaises choses, une très mauvaise langue …

Maender

Ah ? Parce qu’une secte a une tendance gauche ou droite ?

Sagamore

(Rire) Tu retardes de trente ans :
Y’a longtemps que les politiques ne sont plus ni droite ni gauche.
Elles sont mafio-libérales ou démocrates sociales ou… on s’en fout* !

[ *pass’qu’à force de corruptions douces, on n’y croit plus…]

jack

Que s’est bon de voir quelques personnes réveillées 🙂
S’est si rare …. Et pourtant les preuves sont la étale au yeux de tous . Mais s’est tellement dur de se dire que tout ce System “démocratique ” est complètement corrompu …
Mais comment faire une foi que l’on a ouvert les yeux ? Regarder a cote est suivre son bonhomme de chemin ou lutter …telle est la question .

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