La cour de récré (5): Mauvaise ambiance

Déjà, la journée elle a mal commencé. Maître François, il nous a dit comme ça qu’il était de très mauvaise humeur, qu’il avait plein de problèmes et qu’il espérait qu’on serait tous très sages parce qu’il n’avait pas trop de temps à nous consacrer. C’est vrai que ça ne doit pas être tous les jours très facile pour maître François d’avoir sa femme, madame Valérie, qui est toujours là, à l’accompagner à l’école, à l’attendre à la sortie et à lui envoyer plein de messages sur son smartphone. Maître François, il arrête pas d’essayer de lui répondre mais souvent comme il se dépêche, il se trompe sur le clavier. Harold, il lui a dit qu’il pouvait l’aider, qu’en portable et surtout en 3G, il s’y connaissait, grâce à son copain à lui, Patrick, qui lui avait tout expliqué, pas seulement dans la 3G d’ailleurs, mais dans plein d’autres trucs, des histoires d’hôtels et de maisons. Harold, il a dit qu’il n’était d’ailleurs pas le seul à s’y connaître, que Loulou, lui aussi il s’y connaissait… Alors on a tous regardé Loulou, qui était assis sur ses deux chaises, mais Loulou, il avait l’air de très mauvaise humeur aussi : en regardant le plafond, il nous a dit que lui, de toute façon, il n’aimait personne et surtout pas ceux qui étaient arrivés dans la classe il y a pas longtemps. Il a raconté une histoire que j’ai pas bien comprise, un truc de légendes de l’ancien temps, un conte où on parle d’un village de Hobbits perdu dans la montagne, ” Nain-Ville les Roches” qu’il s’appelle. C’est à ce moment-là qu’est arrivé Hilarion pour faire son exposé. Il est directement monté sur l’estrade, devant le tableau et il a parlé de ” gens au bord de la route qu’il fallait aider ” . Un exposé sur l’auto-stop sans doute. Maître François, il a soupiré très fort, en se prenant la tête dans les mains et il a dit à Hilarion que son exposé il avait deux jours de retard et qu’en plus il était complètement hors-sujet. Alors Hilarion, il est retourné s’asseoir en disant que puisque c’était comme ça, il allait couper tous les robinets de l’école, non mais sans blague. Quand elle a entendu le mot ” robinet “, Sylvie elle s’est réveillée pensant que maître François faisait l’appel, puis elle s’est rendormie…

Alors moi, Calédo, j’ai regardé autour de moi dans la classe et je me suis dit que l’ambiance était vraiment trop bizarre depuis que Sonia et un des trois Philippe avaient été élus délégués de classe à la place de Gaël et de Rico. Rico, d’ailleurs, on le voit plus ; paraît qu’il a fugué dans les brousses. Gaël et Gaby, ils se regardent bizarrement. Pierre, lui, il fait un tout petit peu peur : avant il avait tendance à pleurer souvent, maintenant il ricane dans le vide.

Et puis, il y a l’histoire des tentes, des tipis qui ont été installés par les CP dans la cour de récré avec l’aide des grands de notre classe : Gilbert, Rocky et Loulou. Au début, les CP, ils avaient promis que les tipis, ils les démonteraient après le week-end et puis ils ont dit que non, finalement, ils avaient plus envie. Gilbert, Rocky et Loulou ont rigolé et ont dit que les petits, c’était comme ça. Alors les tipis, ils sont là, plantés dans la cour et personne ne sait combien de temps ils vont rester là. Maître François, il est bien embêté avec cette histoire. Il a demandé au directeur de l’école, monsieur Albert, de s’en occuper. Monsieur Albert il a dit que ouh là là, il avait déjà eu plein de soucis dans d’autres écoles, à Grenoble par exemple, et que ça allait bien comme ça… Mauvaise ambiance, je vous dis.

CALCYT

Ps: retour sur les épisodes précédents