La Calédonie a peur !

Je crains d’avoir tort, mais je ne veux pas croire que la diffusion d’une rumeur plus bête qu’énorme, a gâché les festivités du Nouvel An à Nouméa. Si c’était vrai, cela signifierait que nous sommes plus stupides que nous en avons l’air ! Personne dans ce pays n’aurait donc compris le mistigri et tout le monde aurait sauté à pieds joints dans cette affaire sans plus de réflexion qu’un bulot ? Je consens à croire encore à la Nouvelle-Calédonie comme terre de non-dit, mais il y a des limites au mutisme. Je veux mettre la désaffection de la BD ou de l’Anse Vata en ce soir de 31 décembre sur bien d’autres choses comme l’ennui des Calédoniens, le fait que beaucoup soient partis ailleurs, voire même à le mettre sur le compte de la Vie chère, mais pas sur cette fichue rumeur!

En revanche, cette légende urbaine dont tout le monde a parlé jusque dans les dîners en ville, est largement inquiétante en ce qu’elle illustre l’état d’esprit dans lequel nous vivons. À supposer que tout le monde se soit terré chez lui dans la peur du déferlement dans nos rues de hordes sauvages et armées, quelle tragédie, quel échec, quelle tristesse ! Parce que les élections avec leur part d’aléas et d’incertitudes sont proches, nous serions prêts à gober n’importe quoi ! Voilà 26 ans, depuis Matignon, renouvelé par Nouméa, que nous vivons en paix, que la Nouvelle-Calédonie se développe et prospère, et nous avons tout balayé d’un coup, en croyant je ne sais quelle crétinerie balancée sur le Net ! Nous sommes tombés bien bas.

Il est certain que la rumeur aurait été vite pliée si les pouvoirs publics n’avaient pas un millénaire de retard concernant le Net et si certains n’avaient prêté le flanc à cette comédie. Les réseaux sociaux sont montrés du doigt puisqu’ils ont été les vecteurs de la propagation, mais qu’attendent le haussariat, la Nouvelle-Calédonie, la province Sud ou la mairie pour investir ces mêmes réseaux afin d’être en capacité de répondre ? Dans le même temps, la rumeur s’est nourrie du terreau de l’imprudence de gens comme Harold Martin qui par leur propos ont accrédité l’idée que les bruits qu’ont fait courir une poignée d’inconscients, de pleutres et de crétins étaient vrais. Leur part de responsabilité dans l’établissement de la psychose est grande. La sortie du président du gouvernement devant les élus du congrès n’était sans doute pas la meilleure chose à faire. Mais peut-être n’était-ce pas innocent ?

Il faudra reparler de ce 31 décembre 2013 parce qu’il est significatif de tout ce dont nous ne voulons pas. Il illustre la pire part de nous-mêmes : la bêtise, le mensonge, la peur. Aujourd’hui que cette lamentable affaire est déjà loin, chacun se refile la patate chaude et s’accuse mutuellement d’en être le ou les instigateurs. Tout cela parce que nous sommes entrés dans la grande période de la récupération politique. À partir de maintenant, tout sera bon à prendre pour tenter de récupérer des voix, et je mets déjà dans le même sac : la suppression des péages, la reconstruction du mur d’escalade, le plan ISA, la propagation de rumeurs et d’intox… Les élections permettent à la démocratie de vivre et de s’exprimer, elle prendra inévitablement des tours et des détours auxquels nous ne nous attendons pas forcément !

Caton