Le lac des sigles

Y sont malins à l’UMP ! Ils font de la politique comme le roi Salomon rendait la justice : un coup à toi, un coup à moi. On se souvient combien les affaires calédoniennes ont pourri l’existence des chefs de l’UMP, et les luttes d’influence entre Yanno et Frogier ont débordé sur les relations entre Copé et Fillon. Mais cela, c’était avant… Aujourd’hui on joue l’union, du moins en apparence. Du coup pour satisfaire tout le monde, le Conseil National de l’UMP accrédite Yanno comme candidat estampillé UMP pour les municipales à Nouméa et Maurice Ponga comme candidat estampillé UMP pour les Européennes. Et comme ça tout le monde est content et chacun repart avec son petit hochet…

Les sigles, c’est important. Pendant des années, Frogier et les siens nous ont expliqué combien il était capital pour un mouvement calédonien d’être adossé à un grand parti national. Ça aidait pour plein de trucs. Donc, y faut avoir un sigle. Le problème, c’est qu’à 93%, le Conseil national de l’UMP a dit que c’était mieux de donner le sigle UMP au MPC de Yanno, parce qu’il était mieux placé que le Rump dans les sondages. Alors le Rump se console avec Ponga qui sera le candidat de l’UMP pour les Européennes dans la 8ème circonscription… Mais les Européennes, tout le monde s’en fiche en Nouvelle-Calédonie. Qui savait d’ailleurs que les élections européennes auraient lieu cette année ?

Les sigles, c’est important. Pourtant au Rump, on hésite désormais à y faire référence. Lorsque l’on feuillette les programmes de campagne des uns et des autres, en l’occurrence ceux de Jean-Claude Briault, Cynthia Ligeard ou George Naturel, on cherche en vain la référence au Rump. Il n’y ait fait mention nulle part, comme s’il était honteux de rappeler aux électeurs à quel parti on appartient. Curieux non ? Cela dénote quand même le peu de confiance qu’ont ceux qui briguent un mandat dans leur propre structure politique. Comme si la victoire ne pouvait se décrocher qu’à la condition que l’on espère que les Calédoniens oublient le drapeau, Wamytan, la coalition, Pidjot, le parti travailliste, l’indépendance-association… Le problème des élections, c’est que parfois les électeurs ont de la mémoire. Alors pour les aider à ne plus se rappeler, le RUMP fait comme s’il n’existait pas, ou plus, ou mieux… comme s’il n’avait jamais existé. On le remplace dans les professions de foi, les flyers, les portraits et les programmes par le FPU, le Front Pour l’Unité, un sigle nouveau qui ne veut rien dire et qui ne rime à rien.

En face aussi, on joue au jeu des sigles. On les ajoute, les additionne : MPC, RPC, MRC… Consonne, consonne, consonne… pour sortir du chapeau l’ECF, l’Entente pour la Calédonie dans la France… L’abécédaire de cette pauvre petite droite en capilotade, les dernières vaguelettes du RPCR qui se cherche une virginité et mise aussi sur l’amnésie des électeurs. Mais derrière ces lettres, ces logos et ces sigles, il y a un bilan. Celui d’une politique dont les Calédoniens ne veulent plus parce qu’ils en ont bien saisi les limites et les dangers qu’elle représente. Les sigles changent, mais les déclarations et les prises de position demeurent, et ça, mon petit doigt me dit que les Calédoniens ne les ont pas oubliés…

Caton