Emploi Local: Texte adopté à l'unanimité

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Voici les textes qui viennent de partir pour le conseil d’Etat. Je vous en fait en part comme promis. Mille merci à une personne du réseau qui a comprit ma démarche participative. Il est temps de palabrer sur ce qui suit… Le texte se compose de 3 parties: Le projet de loi de Pays, L’exposé des Motifs et les objectifs de ces textes.

LE PROJET DE LOI DE PAYS

LOI DU PAYS

relative au soutien et à la promotion de l’emploi local

Le congrès de la Nouvelle-Calédonie,

Le haut-commissaire de la République promulgue la loi du pays dont la teneur suit,

Article 1er : Le code du travail de Nouvelle-Calédonie est ainsi modifié :

I/ L’intitulé du titre V du livre IV est ainsi rédigé : « Titre V : Soutien et promotion de l’emploi local »

II/ Le chapitre I devient le chapitre II et les articles Lp. 451-1 à Lp. 451- 4 deviennent respectivement les articles Lp. 452-1 à Lp. 452-4.

III/ Le chapitre II devient le chapitre III.

Article 2 : Il est inséré dans le titre V du livre IV du code du travail un chapitre 1er ainsi rédigé :

« Chapitre 1er : Emploi d’un salarié non citoyen de la Nouvelle-Calédonie ou ne justifiant pas d’une durée de résidence suffisante.

« Section 1 : Champ d’application

« Article Lp. 451-1 : L’embauche d’un salarié, lorsqu’il n’est pas citoyen de la Nouvelle-Calédonie au sens de l’article 4 de la loi organique modifiée n° 99-209 du 19 mars 1999, ou qu’il ne justifie pas, pour l’emploi auquel il postule, de la durée de résidence suffisante mentionnée à l’article Lp. 451-2, est soumise aux dispositions du présent titre. Les conjoints ou les personnes liées par un pacte civil de solidarité à un citoyen sont assimilés aux citoyens eux-mêmes pour l’application des dispositions du présent titre1.

Toutefois, ne sont pas soumis à ces dispositions,

– 1° Les salariés recrutés, pour une durée inférieure à trois mois, sous contrats à durée déterminée conclus en application des dispositions des 1°, 2°, 3° de l’article Lp. 123-2 ou sous contrats de travail temporaire conclus en application des dispositions de l’article Lp. 124-5;

– 2° les personnes qui, à la date de publication des dispositions du présent titre, occupent depuis au moins six mois un emploi salarié2.

Section 2 : Conditions de recrutement

« Article Lp. 451-2 : Lorsqu’après avoir diffusé son offre d’emploi dans les conditions définies au chapitre II du titre III, un employeur n’a reçu aucune candidature dont il considère qu’elle répond aux conditions de qualifications et de compétences énoncées dans son offre et émanant :

«  1° Soit d’un citoyen de la Nouvelle-Calédonie ;

«  2° Soit d’une personne justifiant d’une durée de résidence :

a) Inférieure à trois ans, si l’offre d’emploi concerne une activité professionnelle qui connaît d’extrêmes difficultés de recrutement au sens de l’article Lp 451-5 ;

b) Au moins égale à trois ans si l’offre d’emploi concerne une activité professionnelle qui connaît d’importantes difficultés de recrutement au sens de l’article Lp. 451-5 ;

c) Au moins égale à cinq ans, si l’offre d’emploi concerne une activité professionnelle qui connaît des difficultés de recrutement au sens des articles Lp. 451-5 ;

d) Au moins égale à dix ans, si l’offre d’emploi concerne une activité professionnelle principalement satisfaite par le recrutement local,

« il peut procéder à un recrutement sans conditions de résidence.

« Préalablement à l’embauche, l’employeur peut consulter la commission paritaire de l’emploi local mentionnée à l’article Lp. 451-8 aux fins de faire constater la carence de candidature répondant aux spécifications de l’offre d’emploi. L’avis constatant la carence, établi par la commission, est adressé à l’employeur et à l’autorité administrative dans un délai d’un mois à compter de sa saisine. Passé ce délai,  la carence est réputée établie.

« Article Lp. 451-3 : Lorsque l’offre d’emploi porte sur un contrat à durée déterminée ou un contrat de mission d’une durée inférieure à six mois, le délai dans lequel la commission paritaire de l’emploi local constate, s’il y a lieu, la carence, est ramené à dix jours.

« Article Lp. 451-4 : Pour se prévaloir des dispositions du présent titre, le candidat sans emploi doit être inscrit en qualité de demandeur d’emploi.  Par ailleurs toute candidature est écrite et accompagnée des justificatifs nécessaires notamment au regard des conditions de citoyenneté ou de résidence, ainsi que des justificatifs concernant ses qualifications et compétences.

L’employeur délivre au candidat une attestation de la date à laquelle la candidature a été déposée.

« Section 3 : Caractérisation des difficultés de recrutement par activités professionnelles.

« Article Lp. 451-5 : Lorsque sur une période statistiquement significative, il est constaté que les personnes ayant la qualité de citoyen de la Nouvelle-Calédonie ou justifiant d’une durée de résidence au moins égale à dix ans représentent une part du marché du travail :

1° Comprise entre zéro et vingt-cinq pour cent, ces activités professionnelles sont considérées comme présentant d’extrêmes difficultés de recrutement ;

2° Comprise entre vingt-cinq et cinquante pour cent, ces activités professionnelles sont considérées comme présentant d’importantes difficultés de recrutement ;

3° Comprise entre cinquante et soixante-quinze pour cent, ces activités professionnelles sont considérées comme présentant des difficultés de recrutement ;

4° Supérieure à soixante-quinze pour cent, ces activités professionnelles sont considérées comme pourvues principalement par le recrutement local.

« Article Lp. 451-6 : La part du marché du travail mentionnée à l’article Lp. 451-5 est appréciée notamment au vu des données suivantes :

« 1° Les offres et les demandes d’emplois déposées auprès du service public de placement ;

« 2° Les mises en relation réalisées par le service public de placement ;

« 3° Les déclarations d’embauche adressées à l’organisme de protection sociale de la Nouvelle-Calédonie ;

« 4° Les analyses statistiques relatives à l’emploi dans les branches professionnelles.

« Ces données peuvent être corrigées des évolutions prévisibles du marché du travail et notamment des programmes de formation initiale ou continue en cours, ainsi que du début ou de la fin de grandes opérations d’aménagement.

« Article Lp. 451-7. Sur la base de ces données, un tableau des activités professionnelles classées en fonction des difficultés de recrutement est établi par accord interprofessionnel étendu et élargi dans les conditions prévues aux articles Lp. 334-12 et suivants.

« Lorsqu’une activité professionnelle ne figure pas dans le tableau, le classement qui lui est applicable est déterminé par la commission paritaire de l’emploi local, jusqu’à la révision du tableau.

« Ce tableau fait l’objet d’une révision périodique et au moins tous les trois ans.

« A défaut d’accord interprofessionnel intervenu dans un délai d’un an après la publication des dispositions du présent titre,  le tableau est établi par arrêté du gouvernement dans un délai n’excédant pas six mois après le terme prévu pour l’établissement de l’accord. A défaut de révision intervenue au terme de la période de trois ans mentionnée à l’alinéa précédent, le tableau est révisé, dans un délai de six mois, par arrêté du gouvernement. La précédente version du tableau est maintenue en vigueur jusqu’à l’intervention de cet arrêté.

Section 4 : La commission paritaire de l’emploi local

Sous-section 1 : Organisation et fonctionnement

« Article Lp. 451-8 : La commission paritaire de l’emploi local, instituée auprès du gouvernement de la Nouvelle-Calédonie,  est  composée en nombre égal de représentants des organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au niveau de la Nouvelle-Calédonie. L’institut pour le développement des compétences en Nouvelle-Calédonie (IDC-NC) est chargé de son fonctionnement.

« Article Lp. 451-9: La commission paritaire de l’emploi local est présidée les années paires par un représentant désigné en son sein par le collège des employeurs et les années impaires par un représentant désigné en son sein par le collège des salariés.

« Article Lp. 451-10: La commission paritaire de l’emploi local peut, dans des conditions définies par son règlement intérieur, déléguer l’examen de certains dossiers à une formation restreinte à caractère paritaire.

« Article Lp. 451-11 : Les administrations de la Nouvelle-Calédonie, des provinces, des communes et leurs établissements publics sont tenus de fournir à la commission paritaire de l’emploi local toutes les informations statistiques disponibles nécessaires à l’accomplissement de sa mission.

Sous-section 2 : Missions

« Article Lp. 451-12 : La commission paritaire de l’emploi local préconise des actions de promotion et de soutien de l’emploi local notamment en matière de formations en direction des jeunes et des demandeurs d’emploi. Elle propose les adaptations nécessaires au dispositif de formation initiale,  continue et par alternance.  Elle peut être consultée par les employeurs, les organisations syndicales ou les institutions sur toutes les questions relevant de la problématique de l’emploi local.

« Article Lp. 451-13 : La commission paritaire de l’emploi local peut formuler toute proposition et recommandation entrant dans son champ de compétence.

Elle établit un rapport d’activité annuel transmis au gouvernement et aux provinces.

« Article Lp. 451-14 : La commission paritaire de l’emploi local est notamment chargée, lorsqu’elle est saisie par un employeur, de vérifier qu’aucune des candidatures qu’il a reçues émanant d’un citoyen de la Nouvelle-Calédonie ou d’une personne justifiant de la durée de résidence nécessaire mentionnée à l’article Lp. 451-2 ne répond aux critères de qualifications et  de compétences mentionnés dans l’offre d’emploi, ainsi qu’aux critères de  citoyenneté ou de durée de résidence résultant de l’application du présent titre. Dans l’affirmative, elle établit le constat de carence prévu à l’article Lp.  451-2.

« Article Lp. 451-15 : En cas de contestation des conditions d’une embauche, dans un délai d’un mois à compter de celle-ci et préalablement à tout contentieux,  la commission paritaire de l’emploi local est saisie soit par  une des personnes ayant fait acte de candidature dans les conditions de l’article Lp.  451-4, soit par une organisation syndicale représentative au niveau de la Nouvelle-Calédonie, soit par un représentant du personnel de l’entreprise,  aux fins de vérifier que les dispositions du présent titre ont été respectées.

La commission paritaire de l’emploi local émet un avis motivé sur la conformité de cette embauche aux dispositions du présent titre et sur la bonne foi des parties. Cet avis est rendu et notifié aux parties concernées et à l’autorité administrative dans un délai d’un mois à compter de la saisine.

« Elle peut, pour apprécier les qualifications et compétences des candidats, faire réaliser une évaluation des compétences.

« Article Lp. 451-16 : En cas de litige relatif à une embauche relevant du présent titre, la commission paritaire de l’emploi local peut être saisie par l’une des parties aux fins de conciliation.

Section 5 : Sanctions

« Article Lp. 451-17 : Au vu de l’avis de la commission paritaire de l’emploi local prévu par l’article Lp, 451-15 Lorsque dans un délai de trois mois après la conclusion du contrat de travail, l’autorité administrative constate que l’embauche d’un salarié relevant de l’article Lp. 451-1 contrevient aux dispositions du présent titre, elle met l’employeur en demeure de mettre un terme à l’irrégularité constatée. Celui-ci dispose d’un délai de trois semaines pour faire valoir ses observations ou se conformer à la mise en demeure. Il peut se faire assister d’un avocat ou de toute personne de son choix ou représenter par un mandataire. Si au terme de ce délai il n’a pas été mis fin à l’irrégularité ou si les conclusions n’ont pas établi le caractère régulier de l’embauche, l’employeur est astreint, par décision motivée de l’autorité administrative, au versement à titre de pénalité d’une somme dont le montant maximum est égal à 400 fois le taux horaire du salaire minimum garanti, le taux applicable étant celui du mois où l’infraction a été constatée par l’autorité administrative.

« En cas de récidive constatée dans un délai de trois ans après la première infraction ou d’infraction continuée, le montant maximum de la pénalité est multiplié par deux.

« Le titre de perception de ces pénalités, émis par l’autorité administrative, est transmis au Trésor public qui en assure le recouvrement selon les règles applicables aux créances de la Nouvelle-Calédonie.

« Article Lp. 451-18 : La rupture du contrat d’un salarié recruté en méconnaissance des dispositions du présent titre constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement.

Lorsque cette rupture intervient après l’échéance de la mise en demeure par l’autorité administrative mentionnée à l’article Lp. 451-17, elle ouvre droit pour le salarié à une indemnité forfaitaire dont le montant est fixé par délibération du congrès.

«  Article Lp. 451-19 : Sauf disposition contraire, les modalités d’application du présent titre sont définies par délibération du congrès, notamment en ce qui concerne :

1° Les modalités de justification de la qualité de citoyen ou de la durée de la résidence ;

2° L’organisation et le fonctionnement de la commission paritaire de l’emploi local.

Article 3 : Au chapitre II du titre V du livre IV, il est inséré un article Lp. 452-1-1 ainsi rédigé :

« Article Lp.  452-1-1 : Pour l’appréciation de la situation de l’emploi lors de la délivrance d’une autorisation de travail à un étranger, l’autorité administrative se réfère notamment à la caractérisation des difficultés de recrutement par activités professionnelles ainsi qu’au tableau de classement de ces activités mentionnés à l’article Lp. 451-7.

Article 4 : Le code du travail est ainsi modifié :

I  Au titre I du livre IV,  l’article Lp. 411-2 est complété par la phrase suivante :

« Les dispositions des chapitres I et III du titre V ne sont pas applicables à l’Etat. »

II  Au titre III du livre IV,  il est inséré à la section 2 du chapitre II un article Lp. 432-3-1 ainsi rédigé :

« Chaque offre d’emploi est déposée auprès du service public de placement. Elle comporte notamment la définition de l’emploi proposé par référence au tableau des activités professionnelles mentionné à l’article Lp. 451-7. Elle indique de manière détaillée les qualifications et les compétences requises.

« Elle est également portée à la connaissance du personnel par tout moyen. Elle est communiquée au comité d’entreprise ou, à défaut, aux délégués du personnel.

III La section 2 du chapitre II du titre III du livre IV est complétée par un article Lp. 432-6 ainsi rédigé :

« Article Lp.  432-6 : Lorsque l’autorité administrative constate que les formalités mentionnées à l’article Lp. 432-3-1 ont été méconnues, elle informe l’employeur de l’irrégularité relevée et de son intention de prononcer à son encontre une sanction administrative. L’employeur dispose d’un délai de trois semaines pour faire valoir ses observations. Il peut se faire assister d’un avocat ou de toute personne de son choix ou représenter par un mandataire. Si les observations présentées n’apportent pas d’éléments nouveaux de nature à modifier la position de l’autorité administrative, celle-ci, par décision motivée,  astreint l’employeur au versement à titre de pénalité d’une somme au plus égale au montant de l’amende prévue pour les contraventions de la troisième classe.

« En cas de récidive intervenant dans un délai de deux ans après la première infraction, le montant maximum de la pénalité est multiplié par deux.

« Le titre de perception de ces pénalités, émis par l’autorité administrative, est transmis au Trésor public qui en assure le recouvrement selon les règles applicables aux créances de la Nouvelle-Calédonie.

Article 5 : Jusqu’au moment où les données relatives à la citoyenneté et à la durée de résidence seront prises en compte par les statistiques de l’emploi, et au plus tard jusqu’au 1er janvier 2012, le tableau mentionné à l’article Lp. 451-7 dans sa rédaction issue de la présente loi du pays est établi à partir des données objectives qui s’approchent le plus de ces critères.

Article 6 : La présente loi du pays fera l’objet d’un rapport portant sur son exécution à l’issue de sa troisième année d’application.  Ce rapport sera établi par la commission paritaire de l’emploi local et soumis au gouvernement et au congrès.

La présente loi sera exécutée comme loi du pays.

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EXPOSE DES MOTIFS

Objet : Projet de loi du pays relative au soutien et à la promotion de l’emploi local.

I : Historique et contexte

L’Accord de Nouméa du cinq mai 1998 fait dans son préambule le constat que «  […]La taille de la Nouvelle-Calédonie et ses équilibres économiques et sociaux ne permettent pas d’ouvrir largement le marché du travail et justifient des mesures de protection de l’emploi local […] » et qu’ainsi « […]Afin de tenir compte de l’étroitesse du marché du travail, des dispositions seront définies pour favoriser l’accès à l’emploi local des personnes durablement établies en Nouvelle-Calédonie […] ».

De cette rédaction, il doit être retenu que :

– « la Nouvelle-Calédonie prend […] des mesures » : en droit, le présent a valeur d’impératif ; il s’agit donc d’une obligation à la fois juridique et politique, puisque cette disposition découle directement de l’accord de Nouméa ;

– la finalité de ces mesures est de « faciliter l’accès à l’emploi local » des « personnes durablement établies » en Nouvelle-Calédonie : il ne s’agit pas d’interdire l’accès à certaines professions ou métiers, mais d’accorder aux citoyens de la Nouvelle-Calédonie, ou à des personnes ayant une durée de résidence suffisante, un « avantage différentiel » dans l’accès à l’emploi ;

– ces mesures résultent d’un constat relatif à « l’étroitesse du marché du travail » : il y a donc lieu, pour apprécier la nature des mesures prises, de faire le lien entre emploi local et marché du travail.

Le paragraphe 3.1.1 du document d’orientation de l’Accord précise en outre que « [ …] la Nouvelle-Calédonie mettra en place, en liaison avec l’Etat, des mesures destinées à offrir des garanties particulières pour le droit à l’emploi de ses habitants [ …] .»

La loi organique modifiée n° 99-209 du 19 mars 1999 dispose quant à elle en son article 24 :

« Dans le but de soutenir ou de promouvoir l’emploi local, la Nouvelle-Calédonie prend au bénéfice des citoyens de la Nouvelle-Calédonie et des personnes qui justifient d’une durée suffisante de résidence des mesures visant à favoriser l’exercice d’un emploi salarié, sous réserve qu’elles ne portent pas atteinte aux avantages individuels et collectifs dont bénéficient à la date de leur publication les autres salariés.

De telles mesures sont appliquées dans les mêmes conditions à la fonction publique de la Nouvelle-Calédonie et à la fonction publique communale. La Nouvelle-Calédonie peut également prendre des mesures visant à restreindre l’accession à l’exercice d’une profession libérale à des personnes qui ne justifient pas d’une durée suffisante de résidence.

La durée et les modalités de ces mesures sont définies par des lois du pays. »

On constatera ici que la loi organique établit un lien indissociable entre les mesures destinées à faciliter l’accès à l’emploi local et la citoyenneté de la Nouvelle-Calédonie telle qu’elle est définie par l’Accord de Nouméa, en incluant également les personnes justifiant d’une durée de résidence suffisante.

La question doit également être traitée en tenant compte du contexte juridique national (Constitution) et international (conventions de l’organisation internationale du travail, convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme). Ces instruments juridiques invocables en Nouvelle-Calédonie contiennent des dispositions qui sanctionnent les discriminations, notamment fondées sur l’origine. L’accord de Nouméa et la loi organique dérogent d’une certaine manière à ces principes.

Le Conseil constitutionnel s’est prononcé dans sa décision n° 99-410 /DC du 15 mars 1999 sur la conformité de  la loi organique du 19 mars 1999 à la Constitution.

De cette décision il ressort que la dérogation à des principes constitutionnels que porte l’article 24 de la loi organique n’est admissible que compte tenu de la valeur constitutionnelle conféré à l’Accord de Nouméa (art. 77 de la Constitution). L’habilitation ainsi donnée au législateur néo-calédonien (« […] il appartiendra aux lois du pays prises en application de l’article 24  […] ») est donc doublement encadrée puisque les lois du pays devront se fonder « sur des critères objectifs et rationnels en relation directe avec la promotion de l’emploi local » et ne pas imposer de restrictions « autres que celles strictement nécessaires à la mise en œuvre de l’Accord ».

C’est dans ce  contexte juridique que s’inscrit le présent projet de loi du pays.

La problématique de l’emploi local, que la Nouvelle-Calédonie partage avec d’autres collectivités d’outre mer est présente dans son histoire statutaire et sociale depuis plusieurs décennies. Un rapide retour en arrière permet de rappeler ainsi que l’article 1er de la loi-cadre dite Deferre du 23 juin 1956 avait prévu un projet de réforme constitutionnelle ainsi rédigé « Tous les citoyens sont également admissibles aux emplois publics. Les lois établissant le statut particulier de chaque pays d’outre-mer peuvent toutefois en raison des conditions locales réserver certains emplois aux ressortissants du pays intéressé ». De même, les articles 131 et 137 du statut du 6 septembre 1984 prévoyaient déjà un accès privilégié à la fonction publique au profit des populations locales. Dans le même temps, des dispositifs de formation destinés à permettre l’accès des néo-calédoniens à des postes de responsabilité sont élaborés et se poursuivent actuellement.

En 1998, le comité économique et social de la Nouvelle-Calédonie adopte un vœu relatif à l’emploi local.

A partir de 2006 et dans le cadre des sessions du dialogue social initiées par le gouvernement, un groupe composé de partenaires sociaux venant d’horizons divers s’attelle à l’élaboration d’un projet sur la base d’un diagnostic et avec quelques pistes de réflexions.

Ces travaux ont abouti fin 2007 à un document de synthèse joint en annexe au présent rapport.

Les travaux du groupe se sont régulièrement poursuivis tout au long de l’année 2008, à raison d’une réunion par semaine à certaines périodes  pour aboutir à la rédaction d’un premier projet de texte avec l’assistance technique de la direction du travail et de l’emploi.

Il est très vite apparu que ce projet se heurtait à des difficultés juridiques, compte tenu notamment de la réserve d’interprétation émise par le Conseil constitutionnel dans sa décision n° 99-410 du 15 mars 1999 et compte tenu de l’avis rendu par le Conseil d’Etat en 2005 sur le projet de loi du pays sur l’emploi local dans la fonction publique.

A l’instar de la démarche qui avait été suivie avec succès pour l’élaboration du code du travail, le gouvernement a donc sollicité l’assistance technique du Conseil d’Etat pour la rédaction d’un projet de loi du pays. Cette assistance s’est traduite par la venue en Nouvelle-Calédonie d’un conseiller d’Etat en décembre 2008. A l’issue de sa mission et après avoir rencontré les principaux acteurs du dossier (partenaires sociaux, membres du gouvernement, Etat, congrès) le représentant du Conseil d’Etat a proposé un projet de texte susceptible de satisfaire aux contraintes juridiques posées par l’Accord de Nouméa et la loi organique. Ce projet a été présenté à l’ensemble des partenaires sociaux lors de deux réunions qui se sont tenues fin décembre 2008 et qui rassemblaient l’ensemble des organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives.

Ce premier document de travail ayant suscité des interrogations et certains points n’étant pas apparu suffisamment proches de ce qui avait été synthétisé par le groupe de travail en 2007 et 2008, ce groupe de travail a entrepris de retravailler, sur une seconde version du projet. C’est ce projet qui vous est aujourd’hui soumis.

II : Présentation générale du dispositif prévu par le projet de loi

Le dispositif qu’instaure ce projet de loi du pays s’appuie sur quelques éléments fondamentaux. Ces éléments sont au nombre de cinq :

1. Un avantage de recrutement, dont le principe est garanti au niveau constitutionnel par l’Accord de Nouméa et qui est modulé par le projet de loi en fonction de critères objectifs et rationnels (plus ou moins grandes difficultés de recrutement, dans une activité déterminée,   de citoyens ou de personnes justifiant d’une durée de résidence suffisante) ; ces critères, même s’ils peuvent apparaître complexes, sont essentiels puisqu’ils répondent à la nécessité de justifier les mesures prises en faveur de l’emploi local par « l’étroitesse du marché du travail » ;

2. Un mécanisme de recrutement destiné à garantir tant l’effectivité de la priorité d’embauche que l’exigence de non discrimination et la rapidité de la procédure;

3. Une commission paritaire (CPEL) constituée par les partenaires sociaux, chargée d’émettre un avis sur tout recrutement litigieux, de formuler des propositions face à la problématique de l’emploi local et investie d’une mission de conciliation en cas de litige ; cette commission sera également chargée de remettre au gouvernement et au congrès un rapport au terme de la troisième année d’application de la loi.

4. Un tableau des activités professionnelles, document de référence qui permet aux entreprises, aux personnes à la recherche d’un emploi et à la commission paritaire de l’emploi local de se situer au regard des critères de l’emploi local ; le maximum de souplesse a été prévu pour son élaboration comme pour sa mise à jour, en renvoyant notamment à un accord interprofessionnel étendu ;

5. Un mécanisme de sanction mis en œuvre par l’administration en cas de constatation d’une infraction à la loi.

III : Présentation par article du projet de loi du pays

Article premier

L’article premier du projet de loi du pays procède à une renumérotation de certaines parties du code du travail afin de dégager l’espace nécessaire à l’insertion des dispositions suivantes.

Article deux

L’article deux du projet de loi du pays crée au sein du code (titre V du livre IV relatif à l’emploi) un chapitre V relatif à « l’emploi d’un salarié non citoyen de la Nouvelle-Calédonie ou ne justifiant pas d’une durée de résidence suffisante ». Cette définition renvoie directement au texte de l’article 24 de la loi organique. Sont insérés dans ce chapitre les articles  Lp. 451-1 à Lp. 451-19.

Article Lp. 451-1

Cet article détermine le champ d’application de la loi en ne la rendant applicable qu’aux seules personnes ne pouvant justifier soit de la qualité de citoyen de la Nouvelle-Calédonie soit d’une durée de résidence suffisante en fonction de l’activité professionnelle exercée (ces durées étant elles-mêmes fixées par la loi).

L’avantage créé par la loi est également étendu aux conjoints de citoyens et aux personnes liées à ces derniers par un pacte civil de solidarité. Il s’agit ici d’un élément essentiel du projet de loi.

Une dérogation à ce champ d’application est prévue. Elle concerne les embauches réalisées pour des périodes inférieures à trois mois, que ce soit dans le cadre de contrats à durée déterminée ou de contrats de travail temporaire. La justification de cette dérogation réside ici dans la nécessité de maintenir la souplesse nécessaire à ce type d’embauches de courtes durées destinées généralement à pourvoir à des besoins urgents des entreprises.

Une seconde dérogation apparaît dans le projet de texte avec un statut facultatif, à titre d’information et dans l’attente d’un choix définitif. Il s‘agirait ici d’étendre le bénéfice  de l’avantage crée par la loi aux personnes qui, à la date de publication de la loi, occuperaient depuis au moins six mois un emploi salarié et qui seraient amenées, volontairement ou involontairement à changer d’emploi et à se voir ainsi appliquer les nouvelles règles. L’insertion de cette disposition fait l’objet d’une divergence de fond entre les partenaires sociaux, certains estimant qu’il s’agit ici d’une dérogation trop importante aux principes posés par l’Accord de Nouméa et la loi organique, d’autres estimant qu’il s’agit au contraire d’une mesure transitoire importante destinée à sécuriser des situations individuelles.

Aucun accord n’ayant été trouvé sur cette possible dérogation, les partenaires sociaux ont souhaité que la question soit traitée au niveau politique. Le 2° de l’article Lp. 451-1 ne figure donc dans le projet de loi du pays qu’à titre informatif pour le moment afin d’attirer l’attention du législateur sur la nécessité de trancher ce point.

Article Lp. 451-2

Cet article est relatif aux conditions de recrutement et comporte deux points principaux :

L’employeur doit examiner prioritairement les candidatures émanant soit d’un citoyen de la Nouvelle-Calédonie, soit d’une personne justifiant d’une durée de résidence suffisante au regard de la situation de l’emploi dans l’activité professionnelle dans laquelle elle postule. Trois durées sont envisagées (trois, cinq et dix ans), le principe étant que plus l’activité professionnelle est en susceptible d’être exercée par des demandeurs d’emplois « locaux », plus la durée de résidence exigée est longue ;

Préalablement à l’embauche, l’employeur peut consulter une commission  dite « commission paritaire de l’emploi local (CPEL) », aux fins de faire constater la carence de candidature locale sur l’offre d’emploi déposée.

Il convient de préciser que le critère de la durée de résidence n’est pas exclusif. L’employeur examine les candidatures reçues en tenant également compte des compétences et qualifications des candidats (le projet de loi du pays prévoyant dans un autre article la possibilité pour la commission paritaire de l’emploi local de faire procéder à une évaluation des compétences des candidats).

Article Lp. 451-3

Cet article prévoit que lorsque l’emploi proposé porte sur une courte période, le délai dans lequel la CPEL constate éventuellement la carence est ramené à dix jours au lieu d’un mois. Il s’agit ici encore une fois de tenir compte de la spécificité de ces recrutements de très courte durée qui répondent généralement à des besoins urgents des entreprises.

Article  Lp. 451-4

Cet article pose un principe important. Ne peuvent se prévaloir de l’avantage instauré par la loi que les seuls candidats inscrits en qualité de demandeur d’emploi. Il s’agit d’un demandeur d’emploi actif. La loi prévoit également que toute candidature à un emploi doit être écrite et comporter les justificatifs nécessaires concernant la durée de résidence ou les compétences et qualifications. L’objectif est ici de limiter au maximum les risques de contestation en donnant à l’employeur (et à la CPEL éventuellement saisie) l’ensemble des éléments nécessaires à la décision d’embauche. Dans ce même souci de sécurisation, la loi prévoit que l’employeur délivre obligatoirement au candidat une attestation de dépôt de candidature.

Article Lp. 451-5

Cet article définit les activités professionnelles auxquelles s’appliquent les durées de résidence posées à l’article Lp. 451-2. Le critère retenu est celui, dans un secteur donné, de la part du marché du travail occupée par les citoyens ou de personnes justifiant d’une durée de résidence de dix ans. Quatre domaines d’activités professionnelles sont envisagés :

1. Les activités considérées comme présentant d’extrêmes difficultés de recrutement, dans lesquelles la part des personnes susceptibles de bénéficier de l’avantage au titre de l’emploi local ne dépasse pas vingt cinq pour cent ;
2. Les activités considérées comme présentant d’importantes difficultés de recrutement, dans lesquelles la part des personnes susceptibles de bénéficier de l’avantage au titre de l’emploi local ne dépasse pas cinquante pour cent ;
3. Les activités considérées comme présentant des difficultés de recrutement, dans lesquelles la part des personnes susceptibles de bénéficier de l’avantage au titre de l’emploi local ne dépasse pas soixante quinze pour cent ;
4. Les activités considérées comme pourvues principalement par l’emploi local, dans lesquelles la part des personnes susceptibles de bénéficier de l’avantage au titre de l’emploi local dépasse soixante quinze pour cent.

Plus les activités professionnelles se caractérisent par des difficultés de recrutement en main d’œuvre locale, plus la durée de résidence requise est abaissée.

Article Lp. 451-6

Cette disposition explicite la notion de « part du marché du travail » La loi précise que cette part du marché est appréciée en tenant compte d’un ensemble de données (offres et demandes d’emploi, mises en relations, déclaration d’embauche, analyse) qui devront être tenues à jour et communiquées par les services et organismes compétents. La loi prévoit également que ces mesures sont affinées en fonction des programmes de formation en cours et de l’état d’avancement des grands chantiers créateurs  d’emploi.

Article Lp. 451-7

Cet article prévoit la création d’un tableau des activités professionnelles. Ce tableau classera les activités professionnelles en fonction des difficultés de recrutement mentionnées à l’article Lp. 451-5. Il s’agit ici d’un élément central du dispositif puisque ce tableau permettra  concrètement à tout employeur et à tout salarié de déterminer dans quel type d’activité professionnelle (ou niveau de difficulté de recrutement local) se situe l’emploi  proposé et quelles sont ainsi les candidatures qui doivent être privilégiées. Ce tableau sera donc également un outil sur lequel s’appuiera la commission paritaire de l’emploi local ainsi que toutes les personnes susceptibles de saisir cette commission.

La loi renvoie aux partenaires sociaux la responsabilité de l’élaboration de ce tableau, sous forme d’accord interprofessionnel qui pourra être élargi et étendu par arrêté du gouvernement. Il est néanmoins prévu qu’en cas d’absence d’accord entre partenaires sociaux, le gouvernement établisse ce tableau. La même procédure est prévue pour la révision du tableau qui devra intervenir au moins tous les trois ans.

La loi prévoit enfin que lorsqu’une activité professionnelle n’est pas classée dans le tableau, c’est la CPEL qui sera compétente pour classer cette activité dans l’une des catégories de difficulté de recrutement.

Articles Lp. 451-8 à Lp. 451-11

Ces dispositions instituent la commission paritaire de l’emploi local (CPEL), composée à part égale de représentants des organisations syndicales de salariés et d’employeurs représentatives au niveau de la Nouvelle-Calédonie (code du trav. art. Lp. 322-1). Elle est dotée d’une présidence tournante.

Articles Lp 451-12 à Lp. 451- 16

Ces dispositions sont relatives aux  attributions de la CPEL. Elles peuvent être ainsi classées :

1. Attributions consultatives : Outre la saisine spécifique et facultative par un employeur dans le cadre d’une embauche (déjà prévue à l’article Lp. 451-2), la CPEL peut être saisie par les employeurs, les organisations syndicales ou les institutions sur toutes les questions relevant de la problématique de l’emploi local.

2. Attributions précontentieuses : la loi prévoit également une saisine obligatoire précontentieuse dans le cadre d’une embauche contestée. Cette saisine est enfermée dans un délai d’un mois à compter de l’embauche litigieuse (l’objectif étant ici de « cristalliser »  le litige afin d’éviter les contestations ultérieures). Peuvent saisir la CPEL soit les organisations syndicales représentatives au niveau de la Nouvelle-Calédonie, soit les candidats ayant fait acte de candidature conformément à la loi, soit l’employeur, soit un représentant du personnel de l’entreprise concernée. La CPEL saisie dans ce cadre rend un avis motivé aux parties. Il convient de noter que cet avis est également transmis à l’autorité administrative, ce qui permettra à cette dernière de déclencher le cas échéant une enquête.

3. Attributions de conciliation : La CPEL peut jouer un rôle de conciliation en cas de litige lié à une embauche.

4. Pouvoir de proposition : la CPEL peut émettre des propositions ou recommandations en matière de soutien et de promotion de l’emploi local.

Article Lp. 451-17

Cette disposition traite du régime de sanction applicable en cas d’embauche d’un salarié contrevenant aux dispositions du projet de loi. La sanction prévue est une amende administrative. Cette sanction, prononcée à l’encontre d’un employeur, ne peut intervenir qu’après enquête contradictoire. Il convient de préciser que l’administration ne peut se saisir librement d’un dossier d’embauche, son intervention est subordonnée à la réception de l’avis émis par la CPEL, ce qui sous-tend donc une saisine préalable de cette dernière par les parties concernées.

Article Lp. 451-18

Cet article permet de tirer les conséquences d’une embauche illégale en disposant d’une part que la rupture du contrat de travail d’un salarié recruté en infraction à la loi constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement et d’autre part, que le salarié dont le contrat est ainsi légalement rompu bénéficie néanmoins d’une indemnité forfaitaire si cette rupture intervient après l’échéance de la mise en demeure de l’administration. Il s’agit ici de permettre à l’employeur de bonne foi de se libérer en toute sécurité d’une situation juridique contraire à la loi, l’indemnité versée constituant dans le même temps un dédommagement justifié du salarié dont le contrat est rompu trop tardivement.

Article Lp. 451-19

Article habilitant le congrès à prendre par voie réglementaire les dispositions d’application de la loi.

Article trois

Article Lp. 452-1-1

Cet article a pour objet d’établir un lien entre la procédure spécifique de délivrance de l’autorisation de travail à un salarié étranger et les critères de recrutement découlant de l’application de la loi (examen de toute demande d’autorisation de travail au regard du tableau de classement des activités professionnelles).

Article quatre

Article Lp. 411-2

Cet article existe déjà et détermine le champ d’application du livre IV du code du travail de Nouvelle-Calédonie. Le projet de loi le complète en prévoyant que les nouvelles dispositions relatives au soutien et à la promotion de l’emploi local ne sont pas applicables à L’Etat. Il s’agit ici d’une conséquence de la répartition des compétences entre l’Etat et la Nouvelle-Calédonie opérée par la loi organique statutaire.

Article Lp.432-3-1

Cette disposition vient compléter les règles existantes en matière de publicité des offres d’emploi en posant au niveau législatif l’obligation du dépôt d’offre d’emploi. Il doit s’agir d’une offre suffisamment précise puisqu’elle doit indiquer les qualifications et compétences requises. La loi prévoit également l’information obligatoire du personnel de l’entreprise où s’effectue le recrutement.

Article Lp. 432-6

Article sanctionnant par une amende administrative et après une procédure contradictoire le non respect de l’obligation de dépôt d’offre d’emploi.

Article cinq

L’article cinq du projet de loi a pour objet d’éviter une mise en place trop tardive du dispositif du fait de l’absence d’outils statistiques  répondant précisément aux prescriptions de la loi. Il est donc prévu, pour une durée limitée jusqu’au 1er janvier 2012, que le tableau des activités professionnelles prévu à l’article Lp. 451-7 sera établi « à partir des données objectives qui s’approchent le plus de ces critères ». Il appartiendra bien entendu aux partenaires sociaux ou à défaut, au gouvernement, d’apprécier la pertinence des indicateurs retenus.

Article six

Compte tenu du caractère novateur de la loi, de la sensibilité du thème traité et de ses implication sur la vie économique et sociale de la Nouvelle-Calédonie, le projet de loi prévoit qu’un rapport portant sur son exécution sera établi par la commission paritaire de l’emploi local et remis au gouvernement ainsi qu’au congrès à l’issue de la troisième année d’application. L’examen de ce rapport permettra d’examiner d’éventuelles améliorations ou corrections à apporter au dispositif.

Ce projet de loi du pays est complété par un projet de délibération.

Ont été consultés à l’occasion de l’élaboration de ce projet de loi du pays :

o le Conseil d’Etat (avis n° ………..) ;
o le conseil économique et social de la Nouvelle-Calédonie (avis n° ………) ;
o la commission consultative du travail (compte rendu de la séance du …….).

Tel est l’objet du projet de loi du pays que j’ai l’honneur de soumettre au congrès de la Nouvelle-Calédonie.

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Objectifs du projet de Loi du pays

* Mettre en œuvre les dispositions du préambule de l’accord de Nouméa et de l’article 24 de la loi organique n°99-209 du 19 mars 1999 relative à la Nouvelle-Calédonie.

* Traduire en termes législatifs les propositions des auditeurs de la session du dialogue social 2007 (sous-groupe de travail emploi local).

Article 24 de la loi organique :

* « Dans le but de soutenir ou de promouvoir l’emploi local,  la Nouvelle-Calédonie prend au bénéfice des citoyens de la Nouvelle-Calédonie et des personnes qui justifient d’une durée suffisante de résidence, des mesures visant à favoriser l’exercice d’un emploi salarié, sous réserve qu’elles ne portent pas atteinte aux avantages individuels et collectifs dont bénéficient à la date de leur publication les autres salariés ».

Décision du Conseil Constitutionnel n° 99-410 DC du 15 mars 1999

* Considérant 17 :  « Il appartiendra aux lois du pays prises en application de l’article 24 [. . . ] de fixer, pour chaque type d’activité professionnelle et chaque secteur d’activité, la durée suffisante de résidence [. . . ], en se fondant sur des critères objectifs et rationnels en relation directe avec la promotion de l’emploi local [. . . ] » et ne pas imposer de restrictions […] autres que celles strictement nécessaires à la mise en œuvre de l’Accord […] »

Eléments fondamentaux du projet

* La création d’un avantage de recrutement au profit des « citoyens et assimilés* »;

* La mise en place d’un mécanisme de recrutement avec l’examen prioritaire des candidatures des « citoyens ou assimilés »;

* La création d’une commission paritaire de l’emploi local (attributions consultatives, précontentieuses, de conciliation et pouvoir de proposition);

* L’établissement d’un tableau des activités professionnelles (classement des activités professionnelles par rapport aux difficultés de recrutement);

* Un mécanisme de sanctions.

* Voir définition infra

Structure du projet de loi du pays

Modification du livre IV du code du travail:

* Section1 : Champ d’application ;
* Section 2 : Conditions de recrutement ;
* Section 3 : Caractérisation des difficultés de recrutement;
* Section 4 : La commission paritaire de l’emploi local ;
* Section 5 : Sanctions ;
* Mesures transitoires.

Champ d’application

Le projet de loi du pays instaure un avantage de recrutement au bénéfice :

* des citoyens de la Nouvelle-Calédonie ;

* des personnes pouvant justifier d’une durée de résidence suffisante ;

* aux conjoints ou aux personnes liées par un pacte civil de solidarité à un citoyen ;

Cet avantage est également étendu :

* aux salariés recrutés pour une durée inférieure à trois mois sous contrats à durée déterminée conclus en application des 1°, 2°, 3° de l’article Lp. 123-2 ou sous contrats de travail temporaire conclus en application de l’article Lp. 124-5 ;

(*Ces personnes sont désignées dans cette présentation par le terme « citoyens et assimilés »).

80 à 85 % des recrutements ne seront pas concernés par la procédure instaurée par la loi.

Le recrutement

Principes :

* L’employeur ne peut recruter un salarié non citoyen ou ne justifiant pas d’une durée de résidence suffisante qu’en cas de carence de candidature de « citoyens et assimilés » répondant aux conditions de qualifications et de compétences définies par l’offre;

Le recrutement (suite)

2. L’employeur peut faire constater la carence de candidature auprès de la commission paritaire de l’emploi local (CPEL) laquelle doit transmettre son avis dans un délai d’un mois à compter de la saisine (délai ramené à dix jours dans le cadre d’un contrat à durée déterminée ou d’un contrat de mission d’une durée inférieure à six mois);

3.Tout candidat à l’embauche doit être inscrit en qualité de demandeur d’emploi pour se prévaloir de ces dispositions. Il doit présenter sa candidature par écrit, accompagnée des justificatifs nécessaires.

La durée de résidence suffisante

1° Si l’offre d’emploi concerne une activité professionnelle qui rencontre d’extrêmes difficultés de recrutement, la durée de résidence suffisante est inférieure à 3 ans ;

2° Si l’offre d’emploi concerne une activité professionnelle qui rencontre d’importantes difficultés de recrutement, la durée de résidence suffisante est égale ou supérieure à 3 ans ;

3° Si l’offre d’emploi concerne une activité professionnelle qui rencontre des difficultés de recrutement, la durée de résidence suffisante est égale ou supérieure à 5 ans ;

4° Si l’offre d’emploi concerne une activité professionnelle pourvue prioritairement par des recrutements locaux, la durée de résidence suffisante est égale ou supérieure à 10 ans.

Les difficultés de recrutement par activités professionnelles

1° Lorsque la part du marché occupée par des « citoyens ou assimilés » est comprise entre zéro et vingt pour cent, on considère que les activités professionnelles présentent d’extrêmes difficultés de recrutement;

2° Lorsque la part du marché occupée par des « citoyens ou assimilés » est comprise entre vingt-cinq et cinquante pour cent, on considère que les activités professionnelles présentent d’importantes difficultés de recrutement;

3° Lorsque la part du marché occupée par des « citoyens ou assimilés » est comprise entre cinquante et soixante-quinze pour cent, on considère que les activités professionnelles présentent des difficultés de recrutement;

4° Lorsque la part du marché occupée par des « citoyens ou assimilés » est supérieure à soixante-quinze pour cent, on considère que les activités professionnelles sont principalement pourvues par l’emploi local.

«Appréciation de la part du marché du travail »

La part du marché du travail est appréciée aux vus notamment :

* des offres d’emploi et des demandes d’emploi;
* des mises en relation ;
* des déclarations d’embauche ;
* des analyses sectorielles ;
* des évolutions prévisibles du marché du travail;
* des programmes de formation ;
* du début et de la fin des grandes opérations d’aménagement.

Tableau des activités professionnelles

Aucune exigence de durée

Extrêmes difficultés

≥ 10 ans

Pas de difficultés

≥ 5 ans

Difficultés

≥ 3 ans

Importantes difficultés

Durée de résidence

Difficulté de recrutement

Activité professionnelle

A partir de l’analyse de ces difficultés de recrutement,

un tableau, établi par accord interprofessionnel précise

la durée de résidence suffisante pour chaque activité

professionnelle.

Tableau des activités professionnelles (suite)

* Lorsqu’une activité professionnelle ne figure pas dans le tableau, le classement est déterminé par la CPEL ;
* Le tableau est révisé au moins tous les 3 ans ;
* A défaut d’accord interprofessionnel, le tableau est arrêté par le GNC.

La CPEL (Organisation)

* Elle est instituée auprès du gouvernement de la NC ;

* Composition: nombre égal de représentants des OS de salariés et d’employeurs représentatives au niveau de la NC.

L’IDCNC est chargé de son fonctionnement;

* Présidence:
* Les années paires par un représentant désigné en son sein par le collège des employeurs ;
* Les années impaires, par un représentant désigné en son sein par le collège des salariés.

La CPEL (Missions)

1° Elle soutient les actions en faveur de l’emploi local , en particulier les formations destinées aux jeunes et aux demandeurs d’emploi et propose les adaptations nécessaires au dispositif de formation. Elle a un rôle consultatif sur toute question relative à l’emploi local;

2° Elle peut formuler toute proposition ou recommandation dans son champ de compétence. Elle établit un rapport d’activité annuel ;

3° Lorsqu’elle est saisie par un employeur, elle vérifie qu’aucune candidature reçue ne répond aux critères de qualification et compétences ni aux critères d’une citoyenneté ou d’une durée de résidence suffisante. Dans ce cas, elle établit un constat de carence ;

4° En cas de litige, elle peut être saisie par un candidat à l’offre d’emploi, par un employeur, par une organisation syndicale ou par un représentant du personnel de l’entreprise. Dans ce cas, elle établit un certificat de conformité. Elle doit être saisie préalablement à tout recours contentieux ;

5° Elle peut, pour apprécier les qualifications et les compétences du candidat, faire réaliser une évaluation des compétences;

6° Elle peut être saisie aux fins de conciliation par l’une des parties à un litige relatif à une embauche.

La CPEL (Moyens)

* Elle peut déléguer l’examen de certains dossiers à une formation restreinte à caractère paritaire ;

* Les administrations de la NC, les provinces, les communes et leurs établissements publics ont l’obligation de fournir à la CPEL toutes les informations statistiques disponibles nécessaires à l’accomplissement de ses missions.

L’offre d’emploi

1.Toute offre d’emploi doit être déposée auprès du service public de placement ;

2. L’offre doit comporter la définition de l’emploi proposé et préciser les qualifications et compétence requises ;

3. L’offre doit être portée à la connaissance du personnel de l’entreprise et communiquée aux représentants du personnel.

L’offre d’emploi (suite)

Lorsque l’employeur a méconnu les formalités obligatoires à l’établissement de l’offre d’emploi, il est passible d’une sanction administrative (pénalité d’une somme au plus égale au montant de l’amende d’une contravention de la troisième classe). En cas de récidive, le montant maximum de la pénalité est multiplié par deux.

Sanctions

1. Après le constat d’une embauche irrégulière et au vu de l’avis de la CPEL, l’autorité administrative met en demeure l’employeur de régulariser la situation dans un délai de trois semaines.

2. Si la situation n’a pas été régularisée à la fin du délai de trois semaines, l’employeur est astreint au versement d’une pénalité dont le montant maximal est égal à 400 fois le taux horaire du salaire minimum garanti.

3. En cas de récidive ou d’infraction continuée, l’amende est multipliée par deux.

Autres dispositions

* Pour l’attribution d’une autorisation de travail à un étranger, l’administration doit également se référer au tableau des activités professionnelles;

* Les dispositions de la loi ne sont pas applicables à l’Etat (répartition des compétences).

* Le non respect de l’obligation de dépôt de l’offre d’emploi peut donner lieu, après enquête contradictoire, à une sanction administrative.

Indemnité de rupture du « contrat irrégulier »

La rupture du contrat qui intervient pour mettre fin à la situation d’embauche irrégulière constitue une cause réelle et sérieuse de licenciement. Le salarié a droit à une indemnité forfaitaire versée par l’employeur et dont le montant est déterminé par délibération du congrès, si la rupture intervient postérieurement au délai de mise en demeure pour mettre fin à la situation d’embauche irrégulière.

Mesures transitoires

Le tableau des activités professionnelles est établi à l’aide de données objectives se rapprochant le plus des critères objectifs et rationnels prévus par le projet de LP, dans l’attente de statistiques de l’emploi détaillées et ce, au plus tard jusqu’au 1er janvier 2012.

Rapport sur l’exécution de la loi du pays

A l’issue de sa troisième année d’application, la loi du pays fera l’objet d’un rapport sur son exécution établit par la CPEL et soumis au GNC et au congrès.

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Rappel du billet du 03 Mars 2009: Ca a fait quelques secondes dans les médias aujourd’hui mais ce projet de loi du pays, qui doit encore être examiné par le Conseil d’Etat puis approuvé par le Congrès de la Nouvelle-Calédonie, se propose d’établir une nouvelle approche du marché du travail comme l’ont souhaité les signataires de l’Accord de Nouméa, souhait confirmé par la loi organique de 1999. Il ne s’agit pas d’exclure mais de proposer aux citoyens calédoniens et aux personnes justifiant d’une durée de séjour suffisante, la possibilité d’avoir accès à l’emploi sans pour autant pénaliser les employeurs publics ou privés. Les différentes dispositions de cette loi seront encadrées et suivies grâce à la création d’une commission paritaire de l’emploi local, y compris en cas de litige. (source Gouvernement de NC)

emploi

J’en ai la peur au ventre d’aborder un tel sujet avec vous sur le blog, c’est moi qui vous le dis. En effet, on peut remarquer que depuis quelques jours, tous les sujets tournent au vinaigre quel qu’en soit le thème abordé. Ca commence à foutre la frousse de poster quelque chose à force mais bon, j’peux abandonner en si bon chemin, ce serait con non ? Bref, j’essaye tant bien que mal de me procurer le dernier texte qui part au Conseil d’Etat afin que nous puissions le commenter ensemble dans le respect des opinions de chacun et avec intelligence. Les emails sont partis dans tous les sens, même au niveau national pour que je puisse me procurer ce texte. Si vous avez des tuyaux, je suis preneur. Je ne promettrai rien et ne ferai pas de cadeau. Je trouve simplement indescent de ne pas faire participer la population à ce débat tellement sensible. De toutes manières on croirait que le sujet emploi local est un terme endémique à la Nouvelle-Calédonie, il n’y a qu’à voir les résultats d’une requête dans google web et google images. Ce billet sera donc remis à jour dès que le texte me parviendra !

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Créateur le 18 octobre 2006 du blog Calédosphère, Franck Thériaux est papa à temps plein d'une petite fille née le 1er Juin 2012. Selon son entourage, il passe beaucoup trop de temps sur internet… Membre émérite de la rédaction, il vit aujourd'hui en métropole après 23 belles années passées sur le Caillou. Il est en contact quotidien avec l’équipe et continue à participer à la vie de son « bébé numérique »
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cocolocomexico

si le texte est vraiment voté et si son application est imminente dans la forme proche de celui que tu as posté en intégralité, il ne me reste plus qu`à me tourner vers une patente ou à m’inscrire dans une formation en bâtiment 🙂

merci d’avance à ceux qui pourront me répondre sur le sujet

cocolocomexico

Bonjour

quelqu’un peut-il me donner les dernières nouvelles frqiches sur le front de la loi pour l’emploi local ? Cette loi a-t-elle été voté ? si oui quand entre-t-elle en application ? où puis-je me procurer le texte définitif ?
merci pour ces échanges (en très grande majorité) constructifs

tardy

Elle était intéressante cette discussion. Je l’avais oubliée. C’était au temps des grands délires sur M6 et l’Eldorado calédonien.
Bon ça y est cette fois. On y est. Les Français ne pourront plus venir travailler en Calédonie. L’accès aux emplois leur sera interdit sauf rares exceptions et la loi va être votée par le Congrès dans quelques jours.
C’est comme ça. Yoan va être content…

Seleone

J’ai loupé quelque chose?

BoZ

Coolman, j’espère que cette connaissance littérale quasi parfaite d’une des plus grandes œuvres que la SF nous ai donné (à égalité avec V) ne fait pas de toi un NoLife !!!

Gabuzomeu

yarf yarf yarf, excellent Coolman, l’humour c’est vraiment la meilleure réponse à apporter à yoyo.

COOLMAN
Les Réunionnais. Ces êtres étranges venus d’une autre planète. Leur destination: la Calédonie. Leur but: en faire leur univers. David Vincent les a vus. Pour lui, tout a commencé par une nuit sombre, le long d’une route solitaire de campagne, alors qu’il cherchait un raccourci vers TONTOUTA qu’il ne trouva jamais. Cela a commencé par une piaule abandonnée, et par un homme que le manque de sommeil avait rendu trop las pour continuer sa route. Cela a commencé par l’atterrissage d’un avion austral venu d’une autre galaxie. Maintenant, David Vincent sait que les Réunionnais sont là, qu’ils ont pris forme… Read more »
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